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ENTRETIENS 25 avril 2024

Jérôme Pernoo, violoncelliste à tous crins
© Eric Sebbag

Jérôme Pernoo

En 1999, Jérôme Pernoo, invité par l'Orchestre National de France dirigé par Pascal Rophé, faisait découvrir au public subjugué le Premier Concerto pour violoncelle d'André Jolivet. Polyvalent, il vient de fonder un ensemble baroque intitulé " les sauvages " qui s'est brillamment illustré au Festival Couperin de champs-sur-marne.

 

Le 10/07/2000
Propos recueillis par Olivier BERNAGER
 



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  • À vingt-huit ans, quel est votre parcours musical ?

    J'ai fait mes études de violoncelle tout bêtement en France avec Philippe Muller. Auparavant j'avais été l'élève de Xavier Gagnepain qui a beaucoup compté dans mon évolution car il a su conjuguer en moi, dès le plus jeune âge, la technique et la musique. J'ai commencé très tôt, vers six ans car je suis d'une famille de musiciens. Mon père est chef d'orchestre et ma mère violoniste amateur. Cet environnement a été fondamental pour ma carrière ultérieure. Quand je suis rentré au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris, je me suis retrouvé dans un univers de rencontres au plus haut un haut niveau musical et m'en suis retrouvé très rassuré. J'ai pu dans ce contexte anticiper ce que serait ma future vie de musicien. Paris me suffisait et je n'ai pas été tenté d'aller voir ce qui se passait aux États-Unis, notamment à la Juilliard School, comme certains de mes condisciples. Mon maître, Philippe Muller, avec sa manière simple, juste, rigoureuse me suffisait m'a mis sur la voie. Je n'ai eu qu'à la suivre.

     
    L'enseignement du violoncelle en France serait-il controversé ?

    L'école française de violoncelle est brillante : il y a des Français en finale dans tous les concours internationaux. J'en ai donc passé. Ils rassemblent tout ce qu'il existe de plus anti-musical. À nous d'en être conscients et de déterminer ce que nous y cherchons. Un concours doit avant tout être un concours sur soi-même, une occasion de dépassement de soi. En 1994, à vingt-deux aux, j'ai passé le Concours Rostropovitch à Paris, à quelques mois de mon Concours Tchaïkovski, puis celui de Pretoria qui m'a rapporté un Premier Prix et le plaisir de n'avoir plus aucune envie d'en passer d'autres ! Toujours est-il qu'il y a trop de Concours Internationaux sur le marché : ils n'assurent plus, comme il y a vingt ans, le démarrage dans la carrière. Ils sont moins dotés, ouvrent moins les portes ! Les producteurs de concerts et de disques d'aujourd'hui préfèrent écouter les jeunes solistes dans d'autres contextes, préférentiellement dans de grandes salles avec de grands orchestres. Mais comment y accéder en dehors des concours ? C'est la quadrature du cercle ! Comme c'est très périlleux, à chacun de garder la tête froide.
    Quand déjà on a la chance de jouer avec de grands orchestres ou dans des grandes salles prestigieuses (j'ai joué récemment au Wigmore Hall avec Jérôme Ducros), le principal n'est pas de courir après le prestige mais d'avoir des convictions et de les exprimer dans un projet musical.

     
    Aujourd'hui, il semble qu'il faille choisir une spécialisation en musique. Avez-vous choisi ?

    Non, j'ai une double nationalité musicale va de la musique baroque à la musique contemporaine ! En même temps que ma formation traditionnelle au CNSM, j'ai été initié par ma mère au répertoire baroque, à sa sensibilité, à son goût pour la recherche musicologique et stylistique. Ainsi, à la maison, pendant la semaine, quand j'avais neuf-dix ans, je travaillais mon violoncelle de manière tout à fait traditionnelle, et quand venait le week-end, j'ôtais la pique, je baissais tout d'un demi-ton et faisais des basses continues. J'ai gardé cette souplesse, je peux faire le violoncelliste baroque quand il le faut avec autant de plaisir que violoncelliste romantique. Le musicien interprète est à l'image du comédien : il doit pouvoir se mettre dans la peau d'un artiste du XVIIIe siècle comme le ferait un acteur en costume ! Je garde de cela, ma curiosité pour aller chercher au-delà de l'oeuvre que je joue, dans la littérature de l'époque, dans l'environnement culturel autant que dans le style musical et les usages de l'époque.

     
    Vous êtes aussi le défenseur du répertoire oublié du violoncelle, n'est-ce pas ?

    Le violoncelle a mis du temps à se faire connaître en France au début du XVIIIe car la viole tenait le haut du pavé, c'est une basse de violon qui servait principalement à soutenir un orchestre, malgré un splendide répertoire virtuose incarné, entre autres, par Marin Marais. Quelques grands violoncellistes comme Jean Louis Duport ont aidé la pénétration du violoncelle en France en montrant ses possibilités expressives. Ainsi, Bodin de Boismortier, Michel Corrette au XVIIIe ont écrit des sonates pour l'instrument, extrêmement belles et pas très connues. En Italie, le violoncelle était beaucoup plus en vogue. C'est à la période romantique que le violoncelle a pris son essor : Il chante, évoque la voix humaine, figure l'expression intérieure. Mais il y a aussi des petites pièces de salon, moins profondes que les chef-d'oeuvre Schumann ou Brahms mais qui a toute sa valeur comme Tchaïkovski, de Carl Popper.
    Le succès tardif des Suites pour violoncelle de Bach a quelque peu éclipsé les auteurs suivants. Mais il existe des Concertos de Carl Philipp Emmanuel Bach. Les Suites pour violoncelle seul ont été écrites pour l'usage domestique de Bach. Elles ont été par ailleurs véritablement redécouvertes par Casals au XXe siècle.

     
    Quels sont vos projets aujourd'hui ?

    J'ai créé un Ensemble baroque qui s'appelle " Les Sauvages " avec Jérémie Rohrer (clavecin), Stéphanie Degant (violon), Catherine Montié (violon) et Atsuchi Sakaï (viole de gambe), Olivier Bénichou (flûte). Nous nous sommes déjà produits à Deauville en avril dernier et au Festival Couperin en ce début d'été. Dans le festival de Deauville qui est autogéré par les interprètes, j'ai tenu ma place au pupitre de violoncelle dans la " Philharmonie de Chambre de Paris " un orchestre qui rassemble les différents solistes présents et qui était dirigé pour la circonstance par Christopher Hogwood
    Je crois que nous avons la preuve du plaisir que nous avions à jouer dans toutes sortes de formation, depuis le jeu en soliste jusqu'à la prestation collective au sein d'un orchestre.

     

    Le 10/07/2000
    Olivier BERNAGER


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