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ENTRETIENS 26 avril 2024

Laurent Bayle, en route vers la Philharmonie
© P.E. Rastoin

Le projet culturel le plus ambitieux des vingt dernières années, la Philharmonie de Paris, érige ses premières structures. La grande salle de concerts ouvrira à la rentrée 2014 avec l’Orchestre de Paris sous la direction de son directeur musical et de ses deux pères spirituels Pierre Boulez et Daniel Barenboïm.
 

Le 12/09/2011
Propos recueillis par Nicole DUAULT
 



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  • La Philharmonie est sur les rails.

    C’est la première réalisation emblématique du Grand Paris, financée à 45% par l’État, à 45% par la ville de Paris et à 10% par la région Île-de-France. Elle est dans Paris tout en étant contiguë aux banlieues. Paris, c’est deux millions d’habitants intra muros et onze millions autour. Il y a actuellement une surreprésentation culturelle pour deux millions d’habitants par rapport à onze millions d’autres.

     

    Pourquoi y a-t-il eu un retard de deux années ?

    Les freins venaient de la technostructure administrative de l’État qui a demandé des expertises complémentaires. Le feu vert a été donné en décembre 2010 par le président de la République, puis, en janvier 2011, l’association en charge de la construction a signé avec le consortium Bouygues Suez. Le chantier a démarré fin février 2011, pour une durée de trois ans : deux ans de travaux pour le clos couvert, c’est-à-dire la structure en dur et, puis une année pour l’aménagement intérieur de la salle.

    L’ouverture est prévue au printemps 2014, mais uniquement pour tester si tout fonctionne. Les essais acoustiques devraient donc prendre tout l’été. C’est un passage important : à l’inauguration de la Philharmonie de Berlin, rien ne fonctionnait. Il a fallu attendre trois ans pour une mise au point acoustique qui a été résolue simplement en rehaussant la scène.

    La première vraie saison de la Philharmonie de Paris commencera donc à l’automne. Le lancement se fera dès septembre sur un mode festivalier international et populaire d’une quinzaine de jours avec des grandes formations et la volonté d’accueillir de nouveaux publics.

     

    Les pouvoirs politiques ne vous poussent-ils pas à accélérer pour que la Philharmonie ouvre avant la présidentielle de l’an prochain ?

    Il n’y a pas de débat de cet ordre. Le pouvoir politique n’est pas uniforme entre l’État, la ville de Paris et la Région, mais cela n’empêche pas une bonne entente qui évite les surenchères. Nous travaillons à un projet où l’identification entre un chef d’État et un projet spécifique est moins marquée que dans les cas récents de la Bibliothèque nationale et du Musée du Quai Branly, ne serait-ce que par le fait nouveau en matière de grands travaux que l’État et la Ville de Paris sont engagés à hauteur égale.

    Nous sommes dans autre chose, dans la dynamique du Grand Paris. Nous serons sa première réalisation emblématique en étant à la fois dans la ville et à l’extrême côtoiement des banlieues. Le fait d’inscrire un lieu perçu comme appartenant à la culture classique dans une aire mixte de zone de banlieue préfigure ce que l’on imagine du Grand Paris.

    Ce n’est pas l’idée d’opposer classe populaire contre la classe aisée, c’est beaucoup plus souple car de plus en plus d’observateurs sont convaincus de la nécessité d’unifier socialement et culturellement Paris et les territoires qui l’environnent. Aujourd’hui, les choses sont irréversibles. On a convaincu le pouvoir politique qui a récupéré le projet. La Philharmonie sera le fer de lance de la politique musicale.

     

    Le retard entraînera-t-il un surcoût ? Quelles économies vont devoir être faites ?

    Le programme n’a pas été diminué d’un m2, pas plus l’auditorium que les salles de répétitions ou même les espaces réservés aux promeneurs en prolongement du parc. Le projet a trois composantes : les travaux préparatoires atteignent 22 millions d’euros. Le coût des bâtiments est de 216 millions, plus 30 millions pour les petits équipements, soit 268 millions d’euros hors révision de février 2010.

     

    Qu’est-ce qui a changé par rapport au projet initial ?

    Rien n’a bougé dans le projet architectural. Jean Nouvel a pris en compte que la Philharmonie se trouve dans un parc et que le bâtiment peut être dans le parcours des promeneurs du dimanche qui pourront se balader sur la toiture et la pelouse de la Philharmonie. L’effet recherché est symbolique. La Philharmonie est pour tous. L’architecture peut capter des visiteurs au-delà des cercles habituels de la culture.

    Que reproche-t-on généralement aux lieux culturels ? Trop de majesté. Les musées ont un avantage : le tourisme international apporte un flux continu de spectateurs. La question est plus complexe pour la musique. Il ne faut pas que le concert soit l’unique forme mais que s’y ajoutent des expositions, des expériences pédagogiques diverses, des ateliers pour répondre à la curiosité des enfants sans se priver d’autres approches.

     

    Où en est l’idée de Pierre Boulez de créer un flot de création musicale ?

    Elle est respectée. Le modèle est totalement original avec des ateliers, six lieux de répétitions, d’avant-concerts, de masterclasses qui immergeront les jeunes spectateurs dans la musique. Autour de la salle, on installera 2000 m2 d’espaces pédagogiques, notamment pour les enfants qui viendront s’adonner à la pratique musicale avec les musiciens des orchestres en résidence. Nous aurons également des salles nobles d’exposition.

    Avec la Cité de la Musique et le Conservatoire, nous formerons un complexe unique sur le plan mondial permettant d’accueillir un flot de musiciens et de musicologues. Les publics découvriront de surcroît des lieux de convivialité comme des cafés et des restaurants. Au moment de l’ouverture, nous aurons également dans l’environnement proche, je l’espère, une gamme d’hôtels adaptée à nos missions.

     

    Sait-on déjà quelles formations feront l’ouverture à l’automne 2014 ?

    Bien sûr. L’Orchestre de Paris puisque ce sera sa salle mais aussi quelques phalanges internationales dont celles avec lesquelles on a des liens privilégiés : la Staastskapelle Berlin de Daniel Barenboïm ou encore les Berliner Philharmoniker, le London Symphony et le Concertgebouw d’Amsterdam. Nous envisageons également des relations suivies avec Chicago et Cleveland, New York ou Los Angeles. Nous avons d’autre part des liens réguliers avec les Russes et bien entendu le maestro Valery Gergiev.

    Nous voulons de plus renforcer les connexions avec les compositeurs d’aujourd’hui. Je suis très sensible au cloisonnement du monde musical et à la difficulté d’intégrer d’autres cultures. Notre modèle ne se coupera donc pas du jazz, des musiques populaires et des musiques du monde. Parmi les formations qui se produisent à la Cité de la musique, sans doute y-a-t-il des artistes qui doivent basculer dans la nouvelle salle du fait de leur très forte notoriété.

    Nous redéfinirons le projet des deux salles actuelles de la Cité, plus petites, afin d’accueillir davantage la musique de chambre et la musique contemporaine. Nous devons aussi nous battre contre le conformisme des chefs qui abordent toujours le même répertoire. On n’est pas obligé de tout formater sous prétexte que l’on gère une salle de 2400 places.

     

    Allez-vous redéfinir Pleyel ?

    Nous allons conserver la salle Pleyel avec sa mission actuelle jusqu’à l’automne 2014. Ensuite, nous devrons innover. Nous ne voulons pas de confusion entre la Philharmonie et Pleyel. À compter de l’ouverture de la Philharmonie, la salle Pleyel devra fonctionner sans subventions, lesquelles seront dirigées vers la nouvelle salle.

    Elle devra respecter un modèle économique totalement équilibré, ce qui exclut nombre de répertoires classiques. L’idée est qu’elle se recentre autour de propositions artistiques émanant de l’univers populaire et de ce que les anglo-saxons nomment le cross-over afin de définir une offre distincte et complémentaire d’un lieu comme l’Olympia.

     

    Le tram va-t-il améliorer la communication entre la Villette et le centre de Paris ?

    Ce sera un apport indéniable, notamment pour les publics du Nord et de l’Est de Paris. Les perturbations liées aux travaux auront pris fin avant l’inauguration. Mais en attendant, avec les travaux, il est vrai que, jusqu’en 2014, l’accès à la Cité de la Musique est plus difficile pour les publics, du fait aussi que l’on dispose du coup de moins de places de parking, ce qui est un handicap passager.

     

    Une idée du programme du concert d’ouverture de l’Orchestre de Paris ?

    Le directeur musical Paavo Järvi réfléchit à un choix d’œuvres pertinentes et qui mettent en valeur la qualité de l’Orchestre de Paris. Par ailleurs, le programme avec ce même orchestre, autour de ses deux pères spirituels, Pierre Boulez et Daniel Barenboïm, est aussi en discussion. Ne croyez pas que, compte tenu de l’événement, on va redonner la symphonie Résurrection de Mahler : c’était bien pour le retour de l’Orchestre de Paris à Pleyel. Aujourd’hui, il s’agit de se tourner vers la création.

     

    Le 12/09/2011
    Nicole DUAULT


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