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ENTRETIENS 25 avril 2024

Roberto Gini, défricheur baroque
© Universal Accord

Discret et pas carriériste pour un sou, Roberto Gini est l'un des pionniers du renouveau baroque italien. Moins démonstratif que certains de ses confrères, il n'en a pas moins gravé quelques joyaux discographiques. Il était à Paris pour une adaptation scénique controversée du Combattimento de Monteverdi.
 

Le 18/10/2000
Propos recueillis par Roger TELLART
 



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  • Roberto Gini, le public parisien vient de vous découvrir avec les musiciens de l'Ensemble Concerto dans ce Combattimento subversif, bien dans la ligne esthétique du Festival d'Automne. Pourtant, vous êtes loin d'être un nouveau venu dans le concert baroque italien.

    Je crois même que je pourrais revendiquer comme un rôle de pionnier dans l'émergence de ce concert. C'est en effet en 1985 que j'ai fondé l'Ensemble Concerto à Milan, ma ville natale. Seulement, j'avoue que les opérations publicitaires et les campagnes promotionnelles passent chez moi après la pratique de la musique, je suis également violoncelliste et gambiste.

     
    A cet égard, on vous connaissait déjà à travers un certain nombre d'albums où vous laissez parler, entre autres, une vraie intuition monteverdienne. Je pense en particulier à une gravure du Huitième Livre des Madrigaux guerriers et amoureux et à une superbe intégrale du Septième Livre que tous les monteverdiens devraient avoir, à mon sens, dans leur discothèque.

    Oui, je reste assez satisfait de ces disques ; surtout le second album, à deux ou trois points de détail près. Le problème est que je suis paresseux de nature dans la gestion de ma carrière de chef (qui ne se limite pas à l'univers monteverdien mais déborde largement sur le XVIIIe siècle). En outre, j'ai des activités pédagogiques au Conservatoire de Genève, j'y suis professeur d'analyse de la musique baroque en Italie et également chargé d'une classe d'enseignement de la gambe. Autant d'activités qui suffisent à mon bonheur de musicien et de musicologue.

     
    Revenons à Monteverdi et à ce spectacle métissé et iconoclaste sur le Combattimento au Festival d'Automne. Qu'est-ce qui vous a séduit dans le projet du metteur en scène Romeo Castellucci ?

    Avant tout , le sentiment de relever un défi, un "challenge", à partir d'une tentative qui m'a touché dans son foisonnement de vie et ses choix scéniques. Certes, le spectacle a été très négativement accueilli par la critique et, sans doute, la beauté monteverdienne au premier degré ne sort pas indemne de l'aventure. Il y a assurément une volonté provocatrice et intentionnellement "chaotique" chez Castellucci. La volonté de démolir pour remodeler et recomposer un équilibre "catastrophique" selon ses termes, pour faire surgir une interrogation fondamentale sur la vie qui finalement est toujours plus forte que la mort. Et c'est cette interrogation – baroque à sa manière – qui, je le répète, ne me laisse pas indifférent chez lui ; même quand il semble trahir le projet d'harmonie et de beauté du divin Claudio.

     
    Cependant, la musique de Monteverdi ne souffre-t-elle pas dans sa charge dramatique des incises musicales contemporaines et "électroacoustiques" de l'Américain Scott Gibbons ?

    Je ne le pense pas, car il n'y a pas le moindre amalgame – ou "mixage" - entre les deux sources et les séquences de Gibbons sonnent comme des "répons" en modernité au questionnement soulevé par Monteverdi.

     
    Vous nous avez dit, Roberto Gini, que Monteverdi, pour être votre passion majeure, n'empêchait pas votre curiosité de musicien et d'interprète d'aller vers d'autres répertoires, d'autres auteurs. Ainsi Haendel et Vivaldi ont été maintes fois à l'affiche de vos programmes et tout dernièrement vous avez exhumé au disque l'oratorio La Maddalena a'piedi di Cristo de Giovanni Bononcini. Une figure méconnue mais captivante, je crois, qui termina sa vie à Vienne en 1747, au service de la famille impériale.

    Giovanni Bononcini, fils du théoricien Giovanni Maria, est certes beaucoup mieux qu'un petit maître. Un créateur coloré et itinérant (on le trouve à Londres, Paris et Lisbonne entre 1720 et 1735) qui brilla à la scène et à l'église. Dans sa production religieuse, l'oratorio La Maddalena est un chef-d'oeuvre de jeunesse, tendu par une théâtralité qui est toujours en phase avec un précieux sens belcantiste. Tel quel, l'ouvrage est un jalon important dans la carrière de l'oratorio qui mène d'Alessandro Scarlatti à l'Haendel italien du début du XVIIIe siècle. Avec des prémonitions, quant à l'écriture, où Bononcini est en avance de 20 ou 30 ans sur les idées musicales de son temps (La Maddalena fut écrite pour le duc de Modène François II d'Este en 1690). En tout cas, si les circonstances le permettent, j'aimerais continuer à avancer, au concert comme au disque, dans ce répertoire passionnant, où de Bononcini à Caldara – pour citer cet autre nom-là – dorment encore tant de chefs-d'oeuvres ignorés dans l'oubli des bibliothèques.

     



    Discographie sélective

    -Madrigaux de Claudio Monteverdi : Septième et Huitième Livre chez Tactus (2 coffrets séparés)

    -Affetti Musici de Giulio Cesare Monteverdi chez Astrée Auvidis (1 coffret)

    -La Maddalena a'piedi di Cristo de Giovanni Bononcini chez Universal Accord (1 coffret)

     

    Le 18/10/2000
    Roger TELLART


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