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ENTRETIENS 23 avril 2024

Le Trio Wanderer ne déçoit pas du voyage
© Chant du Monde

© Chant du Monde

Passé dix ans d'existence et une Victoires de la musique, le Trio Wanderer a gagné une maturité dont leur dernier album Schubert témoigne. Par leur travail inscrit dans la durée, Vincent Coq (piano), Jean-Marc Philips-Varjabedian (violon) et Raphael Pidoux (violoncelle) renouent avec une tradition à la Beaux-Arts Trio.
 

Le 28/11/2000
Propos recueillis par Gérard MANNONI
 



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  • Pourquoi ce goût particulier du Trio qui n'est pas la forme la plus pratiquée en musique de chambre ?

    Au départ c'est un peu un hasard, dû au travail que nous faisions au Conservatoire et puis nous y avons pris goût avant que ça ne devienne une passion. C'est l'une des formes les plus aboutie de la musique de chambre, beaucoup moins oppressante que le quatuor à cordes. Le répertoire est écrit pour trois solistes alors que celui du quatuor est plus orchestral. Chez nous, chaque instrument a une partie très importante. Nous sommes interdépendants mais plus libres de nous affirmer individuellement. Nous sommes un peu à mi-chemin entre le rôle de soliste et celui de chambriste. Le quatuor est finalement un seul instrument à seize cordes. En revanche notre répertoire est moins vaste.

     
    La présence du piano n'est-elle pas déterminante ?

    Elle rapproche l'écriture pour trio de la sonate. La partie de piano d'un côté, la partie de cordes de l'autre. C'est très souvent comme cela. Le piano est en outre un élément stabilisateur, un repère de justesse. Les quatuors ont beaucoup plus de mal en ce domaine. Nous travaillons actuellement les premiers trios de Haydn où il est très intéressant de voir comment s'établit peu à peu un nouveau rapport de force entre les instruments et comment, face au piano, le violoncelle commence à émerger comme instrument à part entière et pas seulement comme basse continue.

     
    Quelle est justement l'étendue de votre répertoire ? N'êtes-vous pas pris entre les baroqueux qui clament leur suprématie sur le XVIIIe siècle et l'absence de création pour trio qui caractérise l'époque contemporaine ?

    Nous n'avons pas l'intention de mordre sur le domaine spécifique des baroqueux. Les sonates de Bach pour violon, clavecin et basse continue sont clairement pour eux, pas pour nous. Mais à partir de Haydn, il n'y a aucune raison de nous sentir exclus, surtout pour les derniers trios, contemporains de ceux de Beethoven. De toutes manières, l'instrument n'est jamais un élément essentiel. Tout dépend de ce qu'on en fait. À la fin du XVIIIe, on était en pleine révolution non seulement politique mais instrumentale et les compositeurs écrivaient pour les nouveaux instruments dont ils disposaient et qui évoluaient très vite. L'important pour nous est de ne pas utiliser les instruments actuels de la même manière selon l'époque des musiques interprétées. Le Steinway ne doit pas sonner de la même manière pour Haydn que pour Brahms ou Debussy. C'est cela qui compte. Il faut trouver la bonne couleur, le bon équilibre entre les parties, le véritable esprit de la musique. Pour le XXe siècle, il faut reconnaître qu'à partir de 1950, on n'a pratiquement plus écrit pour trio. Les compositeurs actuels sont très prudents aussi. Quand nous serons plus célèbres, nous espérons bien pouvoir relancer cette dynamique. Des compositeurs comme Ligeti, comme Dutilleux nous manquent beaucoup. Nous avons quand même créé le trio de Michèle Reverdy. Thierry Escaich est en train d'écrire pour nous, et la situation va peut-être se débloquer un peu à l'avenir. Il paraît qu'écrire pour trio est très difficile, un vrai casse-tête. Ravel a détesté écrire son trio, Tchaïkovski aussi. Presque tous !

     
    Pour parler encore du répertoire, y a-t-il une logique dans la manière dont vous construisez le vôtre ?

    Il n'y a que celle des organisateurs de concert ! Nous commençons à être connus, mais encore assez pour imposer toujours nos choix. En fait, nous ne le faisons que dans 20 % environ des programmes que nous donnons. Mais cela évolue vite. La dynamique vient aussi beaucoup des enregistrements. Nous n'enregistrons que ce que nous avons déjà beaucoup joué en concert. Pour faire le disque Schubert, nous avons attendu dix ans. Pour Chausson et Ravel, nous sentions aussi que nous étions prêts. En revanche nous ne ferons pas tout de suite au disque les trios de Schumann. D'une certaine manière, nous avons presque tout joué, mais nous ne voulons en aucun cas enregistrer n'importe quoi sous prétexte que c'est dans l'air du temps. Quand nous sentons que nous allons être prêts pour une oeuvre donnée, nous nous efforçons de la donner un maximum dans les deux ans qui précèdent l'enregistrement. La vie de notre répertoire s'articule un peu de cette manière.

     
    Et les " triple concertos " avec orchestre ?

    C'est très important pour nous. Il y a non seulement Beethoven, mais par exemple Martinu, Casella, Malipiero. Même dans le domaine de la musique de chambre, certaines pages sont à découvrir pour beaucoup. Les trios d'Arensky ont un charme et une qualité exceptionnels. Nous les jouerons certainement un jour. Les Russes ont souvent écrit pour notre formation, malheureusement parfois des oeuvres secondaires. C'est le cas de Borodine et de Rimsky-Korsakov. En revanche, Tchaïkovski, Rachmaninov, Chostakovitch nous ont laissé des pages superbes. Les trios français, Chausson, Ravel, Saint-Saens constituent une sorte d'exception, absolument magique et irremplaçable.

     
    Quand vous abordez une partition nouvelle, commencez-vous d'emblée un travail collectif, ou bien chacun arrive-t-il avec quelques idées déjà arrêtées ?

    Nous élaborons tout d'emblée ensemble. Nous déblayons à trois et nous affinons ensuite, au fil des répétitions, car nous faisons un véritable travail d'équipe. Le trio a très souvent été pratiqué par des associations de grands solistes, qui, à l'époque où l'on prenait le temps de travailler lentement parvenaient à une véritable osmose. C'était le cas de Cortot-Thibaud-Casals, ou de Kempff- Szeryng-Fournier. Et puis, avec l'accélération générale de la vie musicale, on est passé à la pratique de trios de fortune, où des solistes se retrouvent, le temps d'un festival, le temps d'un disque ou d'un concert. C'est magnifique pour eux, souvent réussi, mais ce n'est pas le même type de travail. Nous espérons renouer plutôt avec la tradition d'une formation comme le Beaux Arts Trio, qui est connu en tant que tel, sans qu'on sache vraiment qui le constitue. C'est une autre vocation.

     


    Trois disques pour découvrir le Trio Wanderer :
    -Trios de Schubert (op.99 et 100, Notturno-Sonatensatz), Le Chant du Monde
    -Trios de Ravel et Chausson, Le Chant du Monde
    -Trios pour piano, violoncelle & violon Op.49 & 66 Sony Classical

     

    Le 28/11/2000
    Gérard MANNONI


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