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ENTRETIENS 16 avril 2024

Felicity Lott,
la comtesse Ă  voix nue

© M.N. Robert

Felicity Lott dans la Belle Hélène avec Yann Beuron

On la savait cantatrice raffinée et distinguée, mais un tantinet coincée. Depuis sa Belle Hélène, on la découvre canaille, truculente, coquine et habile comédienne. Dame Felicity revient à Paris pour son rôle fétiche, la Comtesse du Capriccio de Strauss au Théâtre des Champs-Élysées, les 14 et 16 décembre.
 

Le 14/12/2000
Propos recueillis par GĂ©rard MANNONI
 



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  • Vous ĂŞtes, semble-t-il, la première surprise de votre rĂ©ussite dans la Belle HĂ©lène mise en scène par Laurent Pelly au Châtelet. Cette expĂ©rience a-t-elle modifiĂ©e votre approche de la scène et de votre rĂ©pertoire habituel ?

    C'est vrai que l'aventure de Belle Hélène a été incroyable. Je n'étais pas sûre de pouvoir répondre aux attentes de Laurent Pelly. J'étais même nettement terrorisée. Et puis tout a fonctionné comme il le fallait, certainement parce que nous avons accompli un vrai travail d'équipe. Je ne suis ni individualiste, ni solitaire, j'ai besoin d'être entourée de partenaires avec qui je me sente en confiance pour donner le meilleur de moi-même. Nous étions tellement tristes quand ça s'est terminé. Je me rappelle que le dernier soir, pendant le duo Ce n'est qu'un rêve, nous avions quasiment les larmes aux yeux, car c'était vraiment pour nous un rêve qui prenait fin. Depuis, je suis retournée dans mes opéras habituels. Je viens de faire la Maréchale du Chevalier à la rose à l'Opéra de Vienne et me voici de nouveau à Paris pour Capriccio. Ce sont des rôles que j'ai tellement chantés, que je ne peux dire que mon interprétation soit aujourd'hui très différente de ce qu'elle était avant la Belle Hélène, mais il est incontestable que je me sens plus libre scéniquement, plus sûre de moi, comme quelqu'un qui a relevé un défi qu'il pensait quasiment impossible. Et il est vrai qu'en me revoyant habillée en Maréchale, je me suis dit qu'il fallait faire attention, que je ne pouvais plus gambader et danser comme je l'avais fait au Châtelet. J'étais un peu triste, mais j'ai vite retrouvé mes marques !

     
    Capriccio est l'un des opéras que vous avez le plus chantés.

    En effet, et quelle que soit la mise en scène que l'on me demande, je pense toujours à celle que j'ai faite le plus, celle de John Cox. C'est elle qui me correspond le mieux. Pour moi, Capriccio est vraiment situé dans les années trente et je m'accommode beaucoup mieux de ce style que de tous les falbalas rococos. Je me sens mieux avec une robe moulante et un long fume-cigarette qu'avec des paniers et une perruque poudrée. L'esprit de la Comtesse est vraiment celui d'une intelligentsia très cultivée de notre siècle. C'est le testament de Strauss et je m'émerveille toujours de voir tous les symboles qu'il y a mis, d'autant que la Comtesse semble vraiment son porte-parole et la muse de tout l'ouvrage. Ici, au Théâtre des Champs-Élysées, nous sommes en concert, mais le chef nous a placés sur une scène surélevée derrière l'orchestre. Nous planons au-dessus des musiciens et nous voyons bien le chef lui-même, ce qui est très important car la partition est vraiment très difficile, avec des ensembles incroyables.

     
    Qu'est ce qui vous rend si heureuse dans la musique de Strauss ?

    Je chante Capriccio depuis tant d'années, que j'ai l'impression de l'avoir dans mon corps. Cette musique est tellement fluide. Mozart est merveilleux mais structuré de façon plus rigide. Ici on a l'impression de voler, d'être porté par le flot musical. C'est très difficile à apprendre car la partie vocale est en parfaite osmose avec l'orchestre et il faut arriver à trouver toutes les correspondances. C'est aussi très difficile à mémoriser, mais une fois qu'on l'a assimilé, c'est pour toujours ! On a presque l'impression de parler. Et puis j'aime beaucoup ces personnages de femmes encore jeunes qui prennent déjà une petite distance par rapport à la vie et à leurs sentiments. La Comtesse ne me paraît pas aussi concrète que la Maréchale. Elle incarne plutôt des idées, la poésie, la musique. On retrouve des échos de tous les opéras de Strauss et le passage orchestral qui précède la scène finale est proprement magique avec son solo de cor. Tout cela est en même temps un peu triste et crépusculaire. J'aurais aimé avoir une voix plus puissante, plus ronde qui me permette d'accéder à Salomé ou plutôt à Daphné. Il faudrait que je prenne le temps de regarder cette partition car ce n'est peut-être pas inaccessible pour moi.

     
    Continuez-vous toujours à explorer de nouveaux domaines dans le répertoire de mélodie ?

    Forlane va bientôt sortir un nouveau disque dans la série "Felicity Lott s'amuse". Cette fois ce n'est pas "d'Offenbach à Poulenc" mais "de Lehar à Loewe", avec des oeuvres assez inhabituelles. Je vais aussi donner ce programme en récital à l'Opéra-Comique en Mars. J'apprécie qu'il y ait une idée à la base des programmes, sauf si on fait une première partie Schubert et une deuxième Schumann. Dans le même ordre d'idées, je prépare également un programme intitulé "Night and Day", avec des chansons sur le jour et puis d'autres sur la nuit. J'essaye de construire ces soirées avec des oeuvres que je possède déjà et j'en rajoute de nouvelles, pour ne pas tout apprendre par coeur d'un seul coup. Toujours ce problème de temps ! Pour la partie "Nuit", il faut que j'apprenne une nouvelle fois la Danse Macabre de Saint-Saens, mais c'est impossible à prononcer. J'avais déjà essayé avec Graham Johnson, mais ce fut une catastrophe, car je mélangeais toutes ces onomatopées : " Zigue Zigue Zigue, l'amour en cadence " etc. Je vais aussi aborder un nouveau rôle dans Albert Herring, une dame un peu plus âgée. Je l'aime moins, mais ce sera un vrai travail d'équipe, c'est pourquoi j'ai accepté.

     
    Ce goût pour le travail d'équipe ne vous a jamais donné envie de faire de la mise en scène ?

    Jamais ! je serais nulle !








    Félicity Lott sera la comtesse de Capriccio, avec l'Orchestre National de France dirigé par Pinchas Steinberg les 14 et 16 décembre à 19 h 30 au Théâtre des Champs-Élysées de Paris.

     

    Le 14/12/2000
    GĂ©rard MANNONI


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