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SELECTION CD 28 avril 2024

Rubinstein, une légende intégrale



BMG a publié l'an dernier tous les enregistrements officiels gravés par Arthur Rubinstein entre 1928 et 1976, soit quelque 94 cd réunis par ordre chronologique dans un gigantesque coffret. De cette somme il a été extrait une première sélection de 20 volumes, suivi d'un jet de 20 nouveaux disques, où domine la figure de Chopin.



Le 12/12/2000
Stéphane HAIK
 

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     Ã‰dition Arthur Rubinstein

    Édition en 20 volumes


    Chopin à fleur de narcisse

    Plus que tout autre volume, la réédition du concert du récital de Moscou de 1964 (volume 62) propose le premier exemple significatif de l'approche de Rubinstein dans Chopin. Constante épaisseur du son, fréquente déflagration du tissu, multiplication du rubato : fréquemment, Rubinstein fait un sort à la musique de Chopin, comme en témoigne la Polonaise n°5, où son toucher atteint une violence diluvienne, souvent irrespirable à force de se mettre martel en doigt. Ce Chopin-là est l'un des plus athlétiques qu'il soit donné d'entendre, toute période d'interprétation confondue : on appréciera ce courage à assumer sans discontinuer la subjectivité d'une telle démarche, mais on soulignera le lourd tribut à payer. La cohérence de l'architecture apparaît dès lors presque plombée par l'absence d'une véritable différenciation au niveau du rythme et de la couleur. Fantasque, le Chopin de Rubinstein a souvent eu à souffrir de cette volubilité digitale gargantuesque. Au prix parfois de libertés contestables, Alfred Cortot savait autrement mieux laisser respirer la phrase et mettre son imagination poétique au service de Chopin. Tout comme Josef Hoffmann, sans doute l'une des meilleures illustrations historiques d'un mélange savamment dosé entre virtuosité féconde et respect de l'écriture.


     



    De là à considérer que le Chopin de Rubinstein est de mauvais goût
    Il n'y a qu'un pas que l'on se refusera à franchir. Car si celui-ci paraît souvent dépasser les limites du "musicalement correct", il comporte aussi de nombreux moments lumineux, telle la marche funèbre de la Sonate n°2 (volume 62), où l'épaisseur digitale – cette fois-ci contrôlée – cède rapidement le pas à un incroyable sens de la respiration, du détail rythmique et du miroitement des timbres. Mieux encore que ce récital moscovite de 1964, où l'émotion de l'événement prend progressivement le dessus sur la musique proprement dite, la version studio 1961 de la Sonate n°2 (volume 46) laisse percer une plus grande clarté, voire un dépouillement de la ligne. Bien sûr, Rubinstein reste là toujours fidèle à sa réputation de musicien narcissique, mais l'intelligence de la construction demeure de mise à chaque instant. De la même manière il est possible de jauger les Ballades, les Scherzos (volume 45), voire les Mazurkas (volume 50) : ces partitions sont emplies de traits contrastés, à la fois violemment exposés et subtilement énoncés, et la pulsation intérieure est d'une logique toujours incontournable.

    Les Concertos n°1 et n°2 (volume 44) sont sans doute les enregistrements Chopin de Rubinstein les plus incontestables d'un bout à l'autre : Rubinstein y est d'un galbe architectural parfait, d'un fini expressif sans maniérisme et sans concessions à l'hédonisme. La qualité de ses prestations est d'autant plus remarquable, que ces dernières ne bénéficient pas de l'aide de Stanislaw Skrowacezwski et d'Alfred Wallenstein, chefs de second plan, mais auxquels nulle faute de goût ne peut être reprochée.

     
    Rachmaninov, une violence bien tempérée


    Si Rubinstein a toujours été associé à la musique de Chopin, en tout cas aux yeux du grand public, les deux versions du Concerto n°2 de Rachmaninov - qu'il enregistra sous la direction de Vladimir Golschmann et Fritz Reiner, respectivement en 1946 et en 1956 – connurent un succès considérable en leur temps, au point d'être parmi les plus célèbres des enregistrements du pianiste polonais. Curieusement, si Rubinstein portait au pinacle les talents de pianiste de Rachmaninov, il n'avait que peu d'estime pour le compositeur à propos duquel il disait : "Je tombe, je dois l'avouer, sous le charme de ses compositions quand je les entends, mais quand je rentre chez moi j'éprouve un léger dégoût pour leur douceur exprimée avec trop d'impudence. "

    Une fois encore, on surveillera, mesure après mesure, l'instant où Rubinstein va faire un sort au Concerto n°2, dont le caractère pyrotechnique est une permanente tentation à l'excentricité de mauvais aloi. Loin des broyeurs d'ivoire de l'après-guerre, il subjugue par la violence tempérée de son toucher et la vélocité de ses tempos : plus encore que dans la première mouture mono avec Golschmann et l'Orchestre symphonique de la NBC (volume 15), c'est avec Reiner et l'Orchestre symphonique de Chicago (volume 35) qu'il réussit vraiment à donner un tranchant phénoménal à ses attaques, sans pour autant dramatiser le discours à foison.

     

    Beethoven, Brahms, Schubert, de simples curiosités



    On pourrait juger pour le moins incongrues les Sonates (volume 33) et les Concertos (volumes 57, 58, 59) de Beethoven, les Sonates pour violon et piano de Brahms (volume 41) – malgré l'excellent Henryk Szeryng -, ou encore la Sonate D.960 de Schubert (volumes 54 et 55). Non que le pianiste n'ait aucune attirance pour le répertoire germanique, mais il a tellement eu à subir les critiques souvent acerbes à Berlin et à Vienne dans la première partie du siècle (qui ne le trouvaient pas assez "profond") que, par la suite, il ne l'a abordé qu'avec prudence et circonspection. Cela nous donne des Beethoven, Brahms et Schubert proprets, sans faute de goût, mais sans éclairs de génie non plus.

     

    Rubinstein latin



    Rubinstein aimait l'Espagne et ses compositeurs, dont il se fit le champion sa vie durant. Étrangement, les excès dont le jeu du pianiste peut parfois souffrir disparaissent ici. Le Polonais – qui avait fait une première grande tournée en Espagne durant la Première Guerre mondiale – offre des interprétations dotées d'un esprit que l'on qualifiera de latin parées d'un miroitement de couleurs permanent et d'une souplesse rhapsodique étonnante. Les pièces de Granados, Albeniz, de Falla et Mompou (volume 18) profitent de ce doigté sensible, coloré, et de cette verdeur rythmique irrésistible. Surtout de Falla : à n'en pas douter, bien avant Alicia de Larrocha, Rubinstein a su aborder les Nuits dans les jardins d'Espagne avec sensualité et ductilité, dans une atmosphère qui n'en demeure pas moins brûlante. D'étonnantes découvertes auditives pour ceux qui ne connaîtraient pas la musique espagnole sous les doigts de Rubinstein.




     



    Albeniz : divers - Beethoven : Les Cinq Concertos, Sonates n° 8, n° 21 et n° 23 -Brahms : Concerto n° 1, Sonates pour violon et piano - Chopin : Concertos n° 1 et n°2, 3 nouvelles études, Les Quatre Ballades, Les Quatre Scherzos, Tarantelle, Les Polonaises, Polonaise-Fantaisie, Andante spianato, Grande Polonaise, Les 51 Mazurkas, Sonate n° 2, Deux Polonaises, Etudes n°4 et n° 5 op. 10, Etudes n° 1 et n° 5 op. 25, Impromptu op. 51, Nocturne op. 27 n° 2, Barcarolle op. 60, Valse n° 2 op. 34, Berceuse op.57 -Falla : Nuits dans les jardins d'Espagne- Grieg : Concerto- Liszt : Concerto n° 1 - Mompou : cançons I danses n° 1 et n°6 - Mozart : Quatuors avec piano, Rondo K.511 Rachmaninov : Concerto n°2, Rhapsodie sur un thème de Paganini, Prélude op.3 n° 2-Saint-Saëns : Concerto n° 2 -Schubert : Sonate D.960, Wanderer-Fantaisie, Deux Impromptus D.899 - Schumann : Concerto, Kreisleriana, Fantaisie op. 17, Des Abends, Carnaval op.9, Novelette n° 1 op.21, Fantasiestücke op. 12, Tchaikovsky : Concerto n° 1-Villa Lobos : O Polichenelo

    Orchestres symphoniques NBC, Boston, Chicago, Minneapolis, Saint-Louis, RCA Victor, Londres, of the air – Golschmann, Mitropoulos, Munch, Dorati, Reiner, Wallenstein, Skrowaczewski, Giulini, Leinsdorf (chefs) – Henryk Szeryng (violon) – Membres du Quatuor Guarneri

    Volumes 15, 18, 20, 22, 33, 35, 41, 44, 45, 46, 48, 50, 52, 53, 54, 57, 58, 59, 62 et 75

    20 volumes BMG 09026 63015-2 à 09026 63045-2 (vendus séparément)

     

     

  • Édition Arthur Rubinstein
     


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