Avec un phrasé très souple, de grandes respirations, un son doux sans la moindre âpreté, beaucoup de nuances, le violoncelliste russe Alexander Kniazevnous donne ici une interprétation très personnelle de ces pages monumentales. Jouant sur la pointe d'une sensibilité plus romantique que baroque, il communique une vie permanente à ces oeuvres que d'autres fixent volontiers dans un univers plus formel.

Il ne se laisse pas emporter non plus dans des excès trop lyriques ni dans une démonstration purement instrumentale ou essentiellement intellectuelle. Esthétiquement, les suites de Bach par Kniazev se situent quelque part entre Natalia Gutmann et Rostropovitch. Tout en gardant l'unité générale de ce corpus et en respectant l'esprit de la forme avec toutes ses variations de mouvement correspondant à autant de variations d'humeurs, il sait trouver aussi ce qui peut différencier certaines suites plus hâtives, comme la 3e en ut majeur, de la monumentale 6e en ré majeur.

Et tout avance toujours, tout est plein de vie, en ne cessant jamais de nous raconter quelque chose. Il y a juste ce qu'il faut de séduction pour que nous ayons envie de pénétrer et de demeurer dans ce monde rigoureux mais coloré, sans que cela ne tombe jamais dans une démagogie racoleuse. Quoi qu'il en soit, ces trois CD procurent de bien beaux moments à celui qui les écoute, ce qui est déjà fort précieux.