L'orient lumineux des Cantigas de Santa Maria |
Cantigas de Santa Maria
Ensemble Gilles Binchois
Françoise Atlan, Anne-Marie Labaude, chant
Dominique Vellard, chant, oud
Emmanuel Bonnardot, chant, vièle, citole & crwth
Keyvan Chemirami, zarb, daf & udu
CD Ambroisie AMB 9973
Voilà un enregistrement qui ne laissera personne de marbre. D'abord parce que Dominique Vellard, en expert des hautes époques, a opté pour des solutions musicales qui élargissent, pourrait-on dire, l'aire géographique habituelle. La présence de l'Iranien Keyvan Chemirami aux cordes pincées rejoint les réflexions contemporaines, dans le baroque mais surtout dans le répertoire médiéval, sur l'interpénétration des diverses influences et leurs survivances à l'heure actuelle.
Françoise Atlan est elle aussi la détentrice d'un art du chant nettement marqué par les traditions orientales, mais dans son cas, une formation classique de haute tenue vient tempérer le dépaysement qu'on pourrait ressentir. De même, le chant pratiqué par les Binchois depuis quelques années privilégie un lyrisme plus large que ce que nous avons l'habitude d'entendre pour le répertoire médiéval.
Dans les Cantigas de Santa Maria, musique entre toutes ouverte aux spéculations et aux expérimentations, les puristes pourront pinailler sur tel ou tel détail, mais l'étourdissant mélange culturel des Cantigas souffre sans conteste ce type de mariage. Le principal reste cependant un résultat musical d'une telle beauté – et également d'une évidence – telle qu'on rend les armes.
Que dire du chant radieux de Françoise Atlan, aux nuances impalpables et aux ornementations à couper le souffle ? Dans le névralgique Chant de la Sybille, elle se mesure bien sûr aux contributions successives de la grande Montserrat Figueras : par d'autres moyens, elle parvient à la même lumière, ce qui n'est pas un mince éloge. La contribution de Keyvan Chemirami fait pour sa part souffler un vent de liberté coloré imparable, d'un naturel confondant.
L'ardeur de ses partenaires exalte merveilleusement le subtil mélange de ferveur et de naïveté d'une musique faussement simple : comme pour la quasi-totalité de ce répertoire, la trame musicale en apparence simple demande de la part de l'interprète des choix sonores judicieux. Grâce soit rendue à Dominique Vellard d'être encore une fois le guide enthousiasmant de ce monde largement mystérieux, même après ces décennies d'exploration intense.
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