Riccardo Chailly dirige Gustav Mahler |
Quatrième Symphonie de Gustav Mahler Royal Concertgebouw Orchestra
Riccardo Chailly (direction), Barbara Bonney (soprano)
Decca 466 720-2
Qui eût cru qu'en cette fin de printemps, la Quatrième Symphonie de Mahler serait à ce point présente dans l'actualité discographique ? Pierre Boulez ouvre le feu avec l'Orchestre de Cleveland chez Deutsche Grammophon. Saisissante, dans le second mouvement, d'un constant raffinement, son interprétation, qui ne ménage pas les zones d'ombre, est quelque peu ternie, dans le Lied terminal, par le chant terriblement prosaïque de la soprano Juliane Banse. Du côté des enregistrements historiques, c'est le retour de la gravure signée en 1958 chez RCA par Fritz Reiner qu'il faut saluer : magnifiée par une prise de son somptueusement restituée, sa vision, qui permet au Chicago Symphony d'étaler sans complexe sa splendeur, est contrastée, nerveuse, sarcastique et ambiguë. Et Lisa della Casa n'a rien perdu de son rayonnement. C'est pourtant Riccardo Chailly qui sort vainqueur de ce tournoi printanier. Il poursuit son cycle mahlérien avec simplicité et bonhomie, par cette partition qui est sans doute l'une des plus lumineuses de son auteur. L'Orchestre Royal du Concertgebouw d'Amsterdam, dont la plénitude sonore demeure irrésistible, est aussi clair que sensuel, et procure un plaisir immédiat, physique, un vrai bonheur d'écoute. Chailly mène son discours avec une volubilité qui n'exclut pas l'émotion dans les variations de l'Adagio. Sans doute le deuxième mouvement, avec son violon accordé volontairement trop haut, pourrait-il être encore plus agressif. Mais les talents de narrateur du chef ouvrent les portes d'un univers onirique et fantastique que Barbara Bonney décrit avec son impeccable diction, son timbre adamantin, et une candeur terrestre dont le sourire se teinte de gourmandise à la pensée des plaisirs paradisiaques qu'évoque le finale. Elle apporte la même apparence d'innocence aux Sieben frühe Lieder d'Alban Berg (donnés dans leur parure orchestrale de 1928), derniers feux d'un romantisme appartenant déjà au passé, et complément bienvenu à enregistrement de grande classe.
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