altamusica
 
       aide















 

 

Pour recevoir notre bulletin régulier,
saisissez votre e-mail :

 
désinscription




SELECTION CD 26 avril 2024

Des crises de piano aiguës



Le piano de l'école de Vienne, dans tous ses états, servi par Mitsuko Uchida: un programme risqué pour la pianiste japonaise, qui est assez contestée en France. Mais elle gagne ici une caution de poids avec la réelle complicité de Pierre Boulez et le " son " de Orchestre de Cleveland. Pari réussi.


Le 30/05/2001
Françoise MALETTRA
 

  • Des crises de piano aiguës
      [ Toutes les parutions ]


  • Les 3 derniers dossiers
  • Les "indispensables" Bach de nos critiques

  • Telefunken Legacy : le nec plus ultra des collections historiques

  • Les dernières parutions pour l'année Bach

    [ Tous les dossiers CD ]


     
      (ex: Harnoncourt, Opéra)


  •  

     Des crises de piano aiguës

    Concerto pour piano d'Arnold SchÂœnberg
    Arnold SchÂœnberg : Trois pièces pour piano, Opus ll, Six petites pièces pour piano, Opus 19
    Alban Berg : Sonate pour piano, Opus I
    Anton Webern : Variations, Opus 27

    Mitsuko Uchida, piano
    Orchestre de Cleveland
    Direction : Pierre Boulez
    1 CD Philips 468 033-2 DDD


    Schoenberg et les siens, une nouvelle fois réunis pour une célébration du piano qui met en évidence l'allégeance au maître d'élèves devenus ses plus fervents disciples. Dans cette zone d'influence, le piano occupe pourtant une place particulière chez Schoenberg qui écrira peu pour l'instrument et s'adressera à lui presque toujours dans les périodes de crise.

    Crise des années 1909-1911, entraînée par l'affranchissement de la tonalité dont les pièces des Op.2 et 19, même si elles sont encore loin de l'orthodoxie du sérialisme qui s'affirmera plus tard, rendent compte déjà de la complexité du langage nouveau. Reste en même temps l'ambiguïté des idées musicales qui hésitent encore à rompre avec l'univers familier de l'élégance et de l'effusion d'un Brahms ou d'un Scriabine.

    Bien plus tardive, la crise des années 1942 est d'une toute autre nature : Schoenberg est exilé en Californie dans l'incertitude de l'issue de la guerre qui ravage l'Europe, il a donné au dodécaphonisme sa forme définitive, " qui devait assurer la suprématie de la musique allemande pendant les cent prochaines années ", et il écrit son Concerto de piano sous le coup d'une urgence émotionnelle dont il décrira clairement les états dans les quatre mouvements : " La vie était facile " (andante), " Soudain la haine a éclaté " (molto allegro), " Une situation grave était créée " (adagio), " La vie continue "(rondo allegro).

     



    On se trouve au coeur d'une architecture savante en forme de biographie avouée, où l'obstination des courtes sections mélodiques provoque l'orchestre dans une tension sans relâche, relayée par un piano haletant et implacable. " Ayez une idée claire au départ de tout exercice, fut-il de pur entraînement- recommandait Schoenberg à ses élèves -, inspirez-vous d'un poème, d'un film ou de votre propre histoire, et ensuite essayez-vous à la libre composition."

    Message reçu par Alban Berg qui, en 1908, soumet à son maître sa Sonate pour piano, en la prétendant inachevée. " Et bien – lui est-il répondu – c'est que vous avez dit tout ce qu'il y avait à dire ! " Rien d'inaccompli dans la partition de ce jeune homme de 23 ans, mais une musique qui progresse par vagues en accords serrés ou motifs très doux, qui reviennent comme dans un rêve, pour se dissoudre dans le silence.

    C'est Anton Webern le disciple, mais le disciple émancipé du maître, qui compose en 1936 les Variations Op.27, l'oeuvre de la grande maturité, au statut aujourd'hui reconnu de grand classique du XXe siècle, et qui multiplie les formes en miroirs donnant l'impression d'une variation infinie, " une construction de cris et de soupirs " écrit Mitsuko Uchida dans le livret qui accompagne le disque.

    À la lire, et surtout à l'écouter, on sent le travail d'entomologiste qu'elle a réalisé pour chaque pièce, les décryptant, les analysant, dans le but de se libérer de la stricte " intelligence " du texte, avant d'y développer des registres expressifs où elle fait preuve de cette saine et indispensable agitation intérieure, sans laquelle point de merveille. Ajoutons la complicité de longue date qui lie Pierre Boulez et Mitsuko Uchida et qui dans le concerto pour piano semble doper (mais en ont-ils vraiment besoin ? ) les musiciens de l'Orchestre de Cleveland.

     

     

  • Des crises de piano aiguës
     


  •   A la une  |  Nous contacter   |  Haut de page  ]
     
    ©   Altamusica.com