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SELECTION CD |
19 avril 2024 |
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Un désir nommé Renée Fleming |
Un tramway nommé désir Opéra d'André Previn
Orchestre de l'opéra de San Francisco
dirigé par le compositeur
Avec Renée Fleming, Elisabeth Futral, Antony Dean Griffey
1 DVD Arthaus
AH 100138 AD190
André Previn est un cas, un personnage inclassable comme on en rencontre rarement dans le monde musical. Pianiste surdoué, passionné de jazz, chef d'orchestre caméléon, la presse américaine ne se s'est pourtant pas privé de lui reprocher une certaine tendance à la facilité, une esthétique musicale figée autour des années cinquante, et de stigmatiser le chef qui n'hésiterait pas à apprendre, dans l'avion, les symphonies qu'il dirigera le lendemain.
Vrai ou faux ? Critiques fondées ou jalousies masquées ? Reste en tout cas le compositeur, un esprit à facettes multiples capable d'illustrer (le mot est faible) un film grand public comme Rollerball.
Depuis quelques années, Previn a de toute évidence décidé de passer à la contre-attaque. Le pianiste enregistre régulièrement des pages ambitieuses pour Deutsche grammophon et le chef devra montrer sa constance et sa régularité à Oslo dont il va prendre la direction de l'orchestre philharmonique et qui a une longue réputation de travail dur et sérieux. À suivre
Ce tramway nommé désir d'après Tennessee Williams est aussi l'expression de sa capacité de réaction. Et le défi opératique peut sembler des plus risqué car il est évidemment impossible d'oublier le mythique film d'Elia Kazan avec Marlon Brando et Vivien Leigh.
Si Previn n'a pas l'habitude de l'écriture pour la scène, sa musique se révèle néanmoins convaincante de simplicité et d'invention. Omniprésent, le jazz contribue à l'atmosphère étouffante des villes du Sud des États Unis (on pense immanquablement à celle des chef-d'oeuvre cinématographiques que sont Angel Heart et Mississippi Burning d'Alan Parker) que Previn laisse mijoter pour la faire lentement basculer dans le drame et la folie.
Du côté de l'écriture musicale, rien de bien révolutionnaire, Stravinsky, Chostakovitch et aussi Bernstein ne sont pas loin, mais que d'aisance et de métier. Previn ne fait pas de cinéma mais sa musique en est habitée de bout en bout.
Dans le rôle titre, Renée Fleming est tout simplement géniale, touchante, impliquée et manifestement désireuse de s'imposer autant par son gosier que par son talent de comédienne. Si nécessaire, elle justifierait à elle seule toute l'entreprise ; mais justement, ce n'est pas utile.
Bien sûr, les tenants d'une musique contemporaine forcément audacieuse et révolutionnaire ne verront dans cet opéra qu'un avatar du romantisme, les autres se laisseront porter par les mélodies, même faciles, et méditeront le texte écorché de Tennessee Williams. Un opéra qui donne envie d'écouter du jazz, de relire un livre et d'aller au cinéma, pas mal pour un seul homme, non ?
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Un désir nommé Renée Fleming | |
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