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SELECTION CD |
26 avril 2024 |
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Lieder et Songs de Hans-Werner Henze Sechs Gesänge aus dem Arabischen (Six Chants de l'Arabe), Three Auden Songs (Trois Mélodies d'après Auden).
Ian Bostridge, ténor
Julius Drake, piano.
1 CD EMI, 2001, n° 7 2435571122 9
Henze est l'une des personnalités les plus fascinantes de la création contemporaine. Curieux et prolifique, il a tâté de tous les genres d'écriture sans jamais s'attacher à une quelconque école. En outre, sa forte implication dans la pensée politique des années 60-70 (comme Abbado, du reste) contribue à rendre sa volumineuse production difficilement classable.
Suffisamment éclectique pour mêler néo-classicisme et sérialisme (Concerto pour Violon, 1947) ou adapter librement Il Ritorno d'Ulisse in Patria (1981), il n'hésite pas à rédiger lui-même des textes de Lieder. Pour preuve, ces Six Chants de l'Arabe (1999), dont voici le premier enregistrement mondial, spécialement dédiés au ténor Ian Bostridge et à son pianiste Julius Drake.
Originale démarche du poète qui conserve malgré tout douze vers de Rückert (d'après Hafiz) et six de Goethe (La Nuit de Walpurgis), sur un total de plus de cent quatre-vingt. Le titre du recueil – un cycle, en fait – fait allusion à des visions (au sens que Rimbaud donnait à ce nom) de Selim et Fatuma sur une côte de l'Afrique, peuplées de fantasmes oniriques. Orientalisme guère nouveau dans notre culture d'ailleurs ; la fascination-répulsion envers le monde arabe remontant, pour le moins, aux Croisades !
Le parti pris du compositeur est bien plus neuf. Une conception de la mélodie sui generis : la musique étant à la fois première (car pensée, sinon écrite, avant même une seule parole), et seconde car chaque accord ou presque reflète un terme du récit
Scansion incantatoire, morcellement des idées mélodiques ne peuvent qu'en surgir. Henze ne se prive pas de très grandes difficultés techniques ; dont une tessiture tendue, éprouvante, tout comme dans les Sieben frühe Lieder de Berg.
Il évite cependant, dans la mesure du possible, de solliciter par trop l'aigu de Bostridge, dont on sait qu'il a facilement tendance à blanchir. Et c'est précisément dans le médium et le grave que l'Anglais accomplit des miracles. Peut-être, aucun de ses Bach (Virgin) ou Schubert (EMI) n'a-t-il mis autant en valeur son velours ; assurément plus catafalque que baldaquin, mais le sien en propre, crépusculaire et troublant. Et surtout ésotérique à souhait : une manière de Quint (Le Tour d'Ecrou) en mélodie – rôle que l'artiste a par ailleurs interprété.
De ce gosier jaillissent, dans un allemand parfait, de bien beaux mélismes orientalisants, tel Aladin de la lampe merveilleuse ; tandis que son compère Julius Drake ne s'économise guère : ce n'est plus de l'accompagnement, mais une fusion totalement originale. Du piano sur un tapis volant.
Admirables miniatures, dont l'une par son titre fait – encore – explicitement référence à Rimbaud ; et où le miel très ambré du ténor le dispute au toucher aérien du pianiste. Ces neuf plages ensemble constituent, tout de go, l'un des plus excitants disques de Lieder et autres Songs composés et enregistrés ces dernières années. L'écoute en boucle est vivement recommandée, de préférence en posture de derviche.
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Henze l'oriental | |
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