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SELECTION CD |
29 mars 2024 |
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While I dream, récital de Barbara Bonney. Liszt : Oh ! Quand je dors/Comment, disaient-ils/S'il est un charmant gazon/Enfant, si j'étais roi/Der Fischerknabe/Mignons Lied/Freudvoll und leidvoll/Der du von dem Himmel bist/Über allen Gipfeln ist Ruh/Im Rhein, im schönen Strome/Die Lorelei/O komm im Traum.
Schumann : Dichterliebe, op. 48.
Antonio Pappano, piano.
1 CD Decca, 0 28947 02892 5
Programme on ne peut plus romantique pour ce nouveau CD qui réunit deux musiciens à la fois amis et rivaux et dont on pourra comparer les versions respectives du poème de Schiller < I > Im Rhein. Liszt a composé près de quatre-vingts mélodies, (en allemand, français, italien
) qu'il n'a cessé de remanier tout au long de sa vie. Pour les interprètes, au choix des oeuvres, s'ajoute celui de la version.
Les douze lieder gravés ici témoignent d'une sélection rigoureuse et pertinente : ce cycle qui commence et s'achève par deux moutures différentes du fameux  Oh ! quand je dors, est tout entier dédié à la rêverie (S'il est un charmant gazon), à la nostalgie (Mignons Lied), à l'imaginaire (Die Lorelei), thèmes qui conviennent si bien au timbre radieux et délicat de la cantatrice. Hugo y côtoie Schiller, Goethe et Heine, c'est dire l'excellence des textes. Barbara Bonney les illumine de sa voix empreinte de sensibilité et de pudeur virginale.
Certes, on aurait souhaité une diction française plus intelligible, davantage d'abandon dans Oh ! quand je dors, ou de ferveur dans Der du von dem Himmel bist, mais il est difficile de ne pas céder face à ce chant de grande classe soutenu par une ligne vocale impeccable. Dans une discographie pour le moins étique cet enregistrement est une aubaine.
En complément de programme les Dichterliebe surprennent : rares, en effet, sont les femmes qui se sont aventurées dans ce territoire réservé aux interprètes masculins, principalement les barytons (en tête Fischer-Dieskau avec près de dix versions pirates inclus !). La voix claire et juvénile de la soprano séduit dès les premiers lieder du cycle, mais Im Rhein  la montre à court de grave, Ich grolle nicht n'est pas ce cri de détresse qu'on a coutume d'entendre.
En fait, l'ensemble baigne dans une mélancolie de bon aloi, où rarement le désespoir affleure. Dans la plaquette du CD la chanteuse justifie ses choix interprétatifs : « J'ai imaginé être la femme à qui les poèmes s'adressaient », et à propos de Ich grolle nicht, « Plutôt que de le chanter de façon agressive [
] je l'aborde comme une chanson d'amour introvertie ». Cette approche peut déconcerter, voire irriter, mais l'artiste la défend avec probité et conviction. Rappelons que Schumann dédia son oeuvre à la soprano Wilhelmine Schröder-Devrient.
Une version atypique, donc - pour le mélomane d'aujourd'hui - qui mérite d'être connue, même si l'on possède déjà l'une des nombreuses références de l'oeuvre : Fischer-Dieskau, bien sûr (DGG et Philips) mais aussi Hampson, Prégardien, Wunderlich
Au piano, le chef Antonio Pappano se montre efficace et discret : l'univers mélodique du jeune Liszt, si proche, par moments, de l'opéra semble l'inspirer davantage que la concision subtile de Schumann, mais sa prestation n'appelle aucun reproche majeur. Si Bonney se veut « la fiancée du poète », Pappano lui n'est qu'un lecteur et un confident.
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