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SELECTION CD 26 avril 2024

Bruckner dans un placard de sacristie



Premier essai dans le domaine symphonique brucknérien, la 7e symphonie enregistrée par Herreweghe et ses troupes des Champs-Élysées, malgré un intérêt sonore évident, ne marquera pas la discographie du compositeur en raison d'un excès de précautions qui vire très vite à l'insignifiance. Sitôt écouté, sitôt oublié ; un comble !


Le 26/11/2004
Yannick MILLON
 

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     Bruckner dans un placard de sacristie



    Anton Bruckner (1824-1896)
    Symphonie n° 7 en mi majeur
    Edition Nowak [sic]

    Orchestre des Champs-Élysées
    direction : Philippe Herreweghe

    CD Harmonia Mundi HMC 901857


    Après un magnifique CD consacré à la musique religieuse du Ménestrel de Dieu il y a plusieurs années, Herreweghe s'attaque à la substantifique moelle de la production brucknérienne, les symphonies. Et si ce nouvel enregistrement de la 7e charme l'oreille par son originalité sonore, il s'essouffle bien vite à la réécoute par excès de précautions.

    Qu'entend-on de vraiment nouveau ? Une pâte sonore dégraissée jusqu'à l'osseux, une lecture chambriste et intime – un tuba translucide aux contours de cornet à bouquin –, refusant l'essence même du tutti brucknérien, une exécution très allante et sans consistance. Toutes les tenues et notes répétées ne pèsent rien – y compris chez les cuivres – et volettent comme de jolies plumes. Mais à force de subtilité, de délicatesse, l'interprétation, assez flatteuse quant à la plastique sonore – hormis un énoncé de première phrase rien moins qu'homogène et des cuivres un peu tremblotants dans l'épilogue funèbre du mouvement lent – sombre trop souvent dans l'insignifiance pour surnager dans une discographie surabondante en références.

    On écoutera les couleurs séduisantes des bois, notamment de la flûte, en regrettant l'absence de projet interprétatif autre que de transformer le dernier Bruckner en adolescent attardé écrivant avec les dynamiques de l'Inachevée de Schubert. Dégraisser est une chose, faire avorter systématiquement les immenses crescendi en est une autre. Où sont les angoisses à 9' du premier mouvement, dissoutes ici dans un bain d'eau tiède, où est l'immense crescendo tellurique à la fin du même Allegro moderato, ici absolument anéanti, avec en lieu de lame de fond aux timbales un léger courant d'air ? Bruckner a beau se situer à « mille lieues du culte de la puissance Â», il ne peint pas, à la fin du XIXe siècle, les trompettes du jugement dernier avec deux flûtes à bec !

    Une fausse « édition Nowak »

    Plus grave, la métrique brucknérienne est ici simplifiée à l'extrême, sans la moindre trace d'assouplissement rythmique. Bruckner prônait certes des fluctuations agogiques minimales, mais pour autant l'orchestre doit-il être privé de respiration dans les fins de phrases, qui tombent comme un cheveu sur la soupe en raison d'un tactus d'une régularité maniaque à la limite de la caricature ? On ne s'attardera pas non plus sur le prétendu choix de l'édition Nowak de la partition, qui, privée comme ici du coup de cymbale et des percussions dans le climax de l'Adagio, s'appelle édition Haas.

    Après cette 7e dérisoire, revenons à nos références du passé, parmi lesquelles le sublime Karl Böhm (DG), et dans les versions plus récentes, le témoignage crépusculaire de Celibidache (EMI) mais surtout la lecture pour le coup révolutionnaire et essentielle d'Harnoncourt (Teldec), qui réussit avec un orchestre traditionnel – le Philharmonique de Vienne – là où Herreweghe échoue avec un vrai ensemble à l'ancienne. Car en guise de cathédrale sonore, le Bruckner d'Herreweghe résonne un peu comme un placard de sacristie.

     
    Yannick MILLON


     

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