Ouvertures allemandes
Felix Mendelssohn-Bartholdy (1809-1847)
Le Songe d'une nuit d'été, op. 21
Carl Maria von Weber (1786-1826)
Euryanthe, J. 291
Oberon, J. 306
Felix Mendelssohn-Bartholdy (1809-1847)
Les HĂ©brides (La Grotte de Fingal), op. 26
Otto Nicolai (1810-1849)
Les Joyeuses commères de Windsor
Heinrich August Marschner (1795-1861)
Hans Heiling
Richard Wagner (1813-1883)
Rienzi, le dernier Tribun
Wiener Philharmoniker
direction : Christian Thielemann
1 CD Deutsche Grammophon 00289 474 5022
Les deux parutions discographiques précédentes de Thielemann avec le Philharmonique de Vienne avaient produit d'exceptionnelles Symphonie alpestre et Vie de héros de Strauss, qui méritent haut la main un Coup de coeur Altamusica. Mais ce nouveau CD d'ouvertures allemandes par les mêmes interprètes pâtit des défauts qu'on attribue constamment – et trop souvent à tort – au chef d'orchestre. En septembre 2002 pourtant, au Théâtre des Champs-Élysées de Paris, Thielemann avait donné avec les mêmes Wiener Philharmoniker une magnifique ouverture du Songe d'une nuit d'été de Mendelssohn, beaucoup plus vivante, élancée, fuyante, que celle présentée sur cette galette très fade réalisée en studio.
Ici, les couleurs de l'orchestre sont souvent magnifiques, avec des bois en état de grâce dans l'introduction lente, mais l'Allegro – pas di molto du tout – sombre vite dans l'anecdotique, avec des accents pas toujours heureux, et un cruel manque d'arêtes vives, de rebond, de pulsation. Mais cette ouverture du Songe n'est rien en comparaison de celle des Hébrides, embourbée dans le legato, jamais narrative, peinant à imprimer un quelconque climat, sans le moindre crescendo dramatique – une coda vidée de toute tension, parfaitement incohérente.
Les deux ouvertures de Weber souffrent des mêmes lacunes, particulièrement un Obéron qui reste collé au plancher du Musikverein avec ses attaques molles, son constant manque de poigne – un Allegro sans fuoco, la coda, mammouthesque. Le chef saute à pieds joints dans son péché mignon : des épisodes lyriques beaucoup trop alanguis et poseurs, perdant alors toute pulsation – thème lyrique d'Obéron, pourtant magnifiquement fondu à la clarinette, dilué jusqu'à l'asphyxie. Et la conduite générale du discours manque en permanence de tranchant, de fermeté et de poigne rythmique.
Effets teutoniques
La grosse machine symphonique de Rienzi tourne à vide, sans énergie, avec ses cuivres paresseux, et se contente de brasser un son épais et pas séduisant. Même dans la très rare ouverture de Hans Heiling, Thielemann ne dépasse ses concurrents discographiques que sur le plan de la seule tenue orchestrale, qui n'est pas de son fait. Quant à l'ouverture des Joyeuses commères de Windsor, à quoi bon imprimer à son introduction lente un climat plus nébuleux que celui du prélude de l'Or du Rhin, pourquoi défigurer un Allegro déjà lourdingue par un subito molto molto meno mosso horriblement teutonique (à 5'10'') ?
Tout au long de cette anthologie, trop de longueur d'archet pour éviter toute dureté finit par donner un son pataud, monochrome et graisseux, et les rares touches originales du chef font grincer des dents par leur emphase – sons étirés dans les transitions, ritardandi énamourés. N'était la tenue de l'orchestre, ce CD finirait au niveau des monstrueux ratages que sont les symphonies de Schumann avec le Philharmonia.
Il faut d'urgence réécouter Toscanini (des Obéron et Euryanthe fulgurants et insurpassables), Cantelli live (un Rienzi incendiaire), Szell (Songe), Furtwängler live, Reiner ou Bernstein (les Hébrides), Kleiber live et surtout Van Kempen (Joyeuses commères) qui font passer la « tradition » défendue par Thielemann dans le romantisme allemand pour un monument de mauvais goût réactionnaire. Dans l'attente de la parution en mars d'une 5e de Bruckner issue du concert d'investiture du nouveau patron de la Philharmonie de Munich, très impressionnante dans sa retransmission télé de novembre dernier, une franche déception chez un chef qui joue au yo-yo dans son parcours discographique.
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