François Couperin (1668-1733)
Les Concerts Royaux (1722)
Le Concert des Nations
Marc HantaĂŻ, traverso
Alfredo Bernardini, hautbois
Manfredo Kraemer, violon
Josep Borras, basson
Bruno Cocset, basse de violon
Xavier Diaz-Latorre, théorbe & guitare
Guido Morini, clavecin
Jordi Savall, basse de viole & direction
CD AliaxVox AVSA9840
Inutile de revenir encore une fois sur la singularité de Jordi Savall, interprète de génie, meneur d'hommes – et chef d'entreprise – comme il y en a peu de par la grâce d'un instinct musical qui impose le respect même aux musiciens de haute volée formant habituellement ses différents ensembles. On ne résiste pas à l'envie de citer les artistes conviés dans cet enregistrement : Marc Hantaï, Alfredo Bernardini, Manfredo Kraemer, Josep Borras, Bruno Cocset, Xavier Diaz-Latorre, Guido Morini, autant dire la crème des baroqueux, tous musiciens qui ont de leur côté formé des groupes de renom, mais qui répondent ici à l'appel d'un quasi-mentor pour nombre d'entre eux.
Inutile non plus d'épiloguer sur les affinités entre le maître catalan et le répertoire français du Grand Siècle, que le succès triomphal de Tous les Matins du monde ne fit que partiellement révéler au grand public. Comme l'écrit Savall lui-même dans le texte de présentation, il était naturel qu'après avoir établi des références absolues dans les autres corpus de Couperin, Le Concert des Nations s'attaquât à l'un des derniers recueils du compositeur français.
« J'avouerai de bonne foi que j'aime beaucoup mieux ce qui me touche que ce qui me surprend » : les mots de Couperin que cite Savall pourraient servir également de credo au catalan. Dans cette oeuvre dont les effectifs sont laissés au bon choix des interprètes, Savall a distribué les rôles en grand coloriste, avec une justesse et une beauté générale guère surprenantes de sa part.
L'élément exceptionnel, c'est sa capacité à fondre en une seule vision artistique les qualités de ses instrumentistes, parfois opposés : les sonorités solaires et plantureuses de Kraemer font contraste avec celles plus légères et parfois un peu acidulées de Bernardini – mais le style et l'éloquence de l'Italien sont imparables. Côté cordes pincées, l'élan de Morini au clavecin se marie à merveille avec la rythmique plus posée – mais non moins énergique – de Diaz-Latorre.
Et tout cela s'unit autour des coups d'archet du maître de cérémonie lui-même, qui imprime à l'ensemble une respiration large, propice en tout cas à un déploiement de phrasés et d'articulations plus sensuels les uns que les autres, sans jamais sacrifier ce sourire mystérieux qui est la marque de Couperin. Un bonheur total !
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