Maurice Ravel (1875-1937)
Daphnis et Chloé, symphonie chorégraphique en trois parties (1912)
Choeur de Radio France
Orchestre philharmonique et Radio-France
direction : Myung-Whun Chung
Enregistrement : Salle Olivier Messiaen, Radio France, Paris, 11/2004
CD Deutsche Grammophon 00289 477 5706
Voilà un grand Daphnis, surprenant, à plus d'un titre. Tout d'abord, la direction de Chung : autant en concert, et les colonnes d'Altamusica en sont souvent le témoin, les lectures du chef coréen peuvent dérouter – tempi démesurément étirés puis précipitations, brusqueries –, autant le souci du détail confère ici au ballet de Ravel une dimension originale.
Car si ce Daphnis et Chloé est une réussite, c'est moins pour la célèbre suite que pour l'ensemble de la pièce, les fameuses « longueurs » que Ravel lui-même reconnaissait à l'oeuvre et à sa narration. Aidé par une prise de son très analytique qui capte les inflexions – et parfois les défauts – du moindre instrument, Chung opte pour une lecture quasi-chambriste, où chaque épisode apparaît comme une miniature ciselée avec grâce – la beauté du pupitre de violoncelles.
Sous son geste, Daphnis redevient symphonie chorégraphique et c'est émerveillé que l'on assiste aux nombreuses péripéties de l'argument. Néanmoins, si l'orchestre scintille de mille éclats alertes, jusqu'à la violence dans une belle Danse guerrière ou la pudeur dans le Lever du jour, une telle lecture réussit moins aux crescendi et au souffle passionné.
Si l'on peut regretter la démesure, la coulée romantique d'un Abbado (LSO, DG), le lyrsime exacerbé d'un Munch (Boston 1955, RCA), la majesté et l'orfèvrerie sonore d'un Boulez (Berlin DG), peu de versions en revanche possèdent une telle dimension narrative. Avec Chung, Daphnis devient un chatoyant livre d'images, qui évoque l'enfance avec lumière, tendresse et fraîcheur, des qualités toutes
ravéliennes.
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