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SELECTION CD 28 mars 2024

Il Ritorno di Monteverdi



Événement en son temps, la trilogie Monteverdi d'Harnoncourt et Ponnelle est longtemps restée emblématique du renouveau baroque. S'il faut admettre que l'ensemble a quelque peu vieilli par rapport aux standards actuels, l'intégrité de la démarche musicale et la cohérence du propos théâtral forcent toujours autant le respect.


Le 20/04/2007
Thomas COUBRONNE
 

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      (ex: Harnoncourt, Opéra)


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     Il Ritorno di Monteverdi



    Claudio Monteverdi (1567-1643)
    L'Orfeo (1607)
    Favola in musica en un prologue et cinq actes
    Livret d'Alessandro Striggio
    Arrangement musical : Nikolaus Harnoncourt



    Philippe Huttenlocher (Orfeo)
    Dietlinde Turban (Euridice)
    Trudeliese Schmidt (La Musica / Speranza)
    Roland Hermann (Apollo)
    Glenys Linos (Messaggera / Proserpina)
    Werner Gröschel (Plutone)
    Hans Franzen (Caronte)
    Suzanne Calabro (Ninfa)
    Peter Keller (Pastor I)
    Francisco Araiza (Pastor II / Spirito I)
    Rudolf A. Hartmann (Pastor III / Spirito II)
    Christian Boesch (Pastor IV)
    JĂłzsef Dene (Pastor V / Spirito III)

    Ballett des Opernhauses ZĂĽrich
    Chor des Opernhauses ZĂĽrich
    direction : Erich Wild

    1DVD Deutsche Grammophon Unitel 00440 073 4163
    Enregistrement : Operhaus, ZĂĽrich, 1-22/12/1977 (son) ; Wien-Film, Wien, 28/03-20/04/1978 (image)


    Il Ritorno d'Ulisse in Patria (1641)
    Dramma per musical en un prologue et trois actes
    Livret de Giacomo Badoaro d'après Homère
    Arrangement musical : Nikolaus Harnoncourt



    Werner Hollweg (L'Humana fragilitĂ  / Ulisse)
    Werner Gröschel (Il Tempo)
    Renate Lenhart (La Fortuna / Giunone)
    Klaus Brettschneider (Amore)
    JĂłzsef Dene (Giove)
    Hans Franzen (Nettuno)
    Helrun Gardow (Minerva)
    Trudeliese Schmidt (Penelope)
    Francisco Araiza (Telemaco)
    Simon Estes (Antinoo)
    Peter Straka (Pisandro)
    Paul Esswood (Anfinomo)
    Peter Keller (Eurimaco)
    Janet Perry (Melanto)
    Philippe Huttenlocher (Eumete)
    Arley Reece (Iro)
    Maria Minetto (Ericlea)

    2DVD Deutsche Grammophon Unitel 00440 073 4268
    Enregistrement : Opernhaus, Zürich, 1-15 février 1979 (son) ; Wien-Film, Wien, 29/10-26/11/1979 (image)


    L'Incoronazione di Poppea (1642)
    Opéra en un prologue et trois actes
    Livret de Giovanni Francesco Busenello
    Arrangement musical : Nikolaus Harnoncourt



    Renate Lenhart (La Fortuna)
    Helrun Gardow (La VirtĂą)
    Klaus Brettschneider (Amore)
    Rachel Yakar (Poppea)
    Trudeliese Schmidt (Ottavia)
    Éric Tappy (Nerone)
    Paul Esswood (Ottone)
    Matti Salminen (Seneca)
    Janet Perry (Drusilla)
    Alexander Oliver (Arnalta)
    Maria Minetto (Nutrice)
    Philippe Huttenlocher (Lucano)
    Peter Keller (Valletto / Famigliaro di Seneca III)
    Suzanne Calabro (Damigella)
    Rudolf A. Hartmann (Liberto)
    Peter Straka (Soldato I)
    Fritz Peter (Soldato II)
    Francisco Araiza (Famigliaro di Seneca I)
    Werner Gröschel (Famigliaro di Seneca II)

    2DVD Deutsche Grammophon Unitel 00440 073 4174
    Enregistrement : Opernhaus, ZĂĽrich, 15-23/06/1978 (son) ; Wien-Film, Wien, 2-30/01/1979 (image)

    Das Monteverdi-Ensemble des Opernhauses ZĂĽrich
    direction : Nikolaus Harnoncourt
    mise en scène, réalisation et décors : Jean-Pierre Ponnelle
    costumes : Pet Halmen
    directeur de la photographie : Wolfgang Treu

    Disponible aussi en coffret 5DVD 00440 073 4278


    La trilogie Monteverdi de Ponnelle et Harnoncourt à Zurich ne restera sans doute pas version de référence, ou même la plus aboutie à l'aune des critères d'aujourd'hui, mais une jubilation palpable à explorer cette musique fait le prix d'un Orfeo enthousiaste, brillamment dirigé, énergique et anguleux. Ponnelle y joue la carte du théâtre, incluant l'orchestre et le chef à une mise en abyme qui, malgré quelques effets de caméra un peu appuyés, trouve dans la joie arcadienne des noces, dans la gravité adolescente du couple des amants, ou encore dans un magnifique tableau des Enfers, un accomplissement rhétorique idéal, sous le regard serein de la Musica, Apollon, Pluton et Proserpine, déités morales assumées qui élèvent l'âme du spectateur au travers de la fable d'Orphée.

    Au-dessus d'un Monteverdi-Ensemble taillé à coups de serpe et aux couleurs très artisanales, qui feront tout de même grincer quelques dents, les chanteurs se jettent à l'eau, qui avec son style imparfait – on redécouvrait à peine Caccini et le trillo –, qui avec son timbre exotique, qui avec sa technique pas impeccable – Philippe Huttenlocher n'est pas le plus gracieux des Orfeo, ni Dietlinde Turban l'Euridice la plus en voix –, mais tout cela exhale une franchise et un esprit collectif en parfaite adéquation avec le style sans concession d'Harnoncourt, et Ponnelle sait tirer du plateau une humanité non dénuée d'humour qui restitue vivante la fraîcheur éphémère de cet opéra sur la tempérance et la modestie qui élèvent l'homme au rang de dieu.

     



    Avec le même choix de l'allégorie omniprésente, le Retour d'Ulysse et le Couronnement de Poppée trouvent dans la dialectique des personnages du prologue qui se disputent la préséance sur la destinée humaine, une dynamique cohérente et qui justifie l'intégralité de l'action. C'est ainsi que l'Amour s'avère le moteur principal de la dramaturgie, de l'aveuglement des personnages, des retournements de situation. Quoique la mise en scène demeure parfaitement historique, avec force perruques, jabots et autres stucs somptueux, elle touche au coeur de la construction des oeuvres et dépasse ainsi très largement la simple lecture au premier degré au profit d'une compréhension intime des enjeux des oeuvres.

    Certains tableaux sont absolument saisissants – le monologue de Pénélope, Trudeliese Schmidt hallucinée – ou d'une grande habileté – ce bras de Poppée qui ferme le passage à Néron au tout début du couronnement –, soit qu'ils dramatisent la situation ou au contraire qu'ils distancient le pathos – la mort de Sénèque, la métamorphose de Minerve. C'est ainsi que Ponnelle souligne la grande modernité de cette trilogie qui sur ce point n'est pas sans rappeler celle de Mozart et Da Ponte.

    Dans la fosse, Harnoncourt opère avec toujours autant de ferveur, expérimentant, cherchant, à l'affût de chaque idée, de chaque couleur, de chaque phrasé qui soulignerait la rhétorique de la situation. Certains ornements sont discutables, tantôt trop mesurés, tantôt trop modernes, souvent trop systématiques, mais la grande mobilité du débit offre déjà, malgré une vocalité parfois assez déplacée pour les oreilles d'aujourd'hui – Werner Hollweg inégal, parfois très vert, Tappy tout de même très rugissant et ténor bien sûr, quelques divinités pas très orthodoxes – et un italien souvent discutable – ces doubles consonnes échouées ici ou là – un recitar cantando très inventif.

    La Poppée de velours de Rachel Yakar

    Certains chanteurs tirent particulièrement bien leur épingle du jeu, telle Rachel Yakar, qui compose une Poppée très féminine, voix de velours fin, caressante juste comme il faut, ou Trudeliese Schmidt, qui en dépit d'un timbre surprenant campe avec expressionnisme Pénélope et Octavie, les deux femmes bafouées de cette trilogie. Janet Perry pétille, Matti Salminen est tout auguste bonté dans une intonation hélas pas irréprochable, et tandis que Francisco Araiza incarne un Télémaque empanaché et juvénile, Paul Esswood prête à Othon son timbre élégiaque et gracile.

    En dépit de ses inégalités, ou peut-être précisément grâce à elles, cette somme judicieusement rendue disponible au DVD par Deutsche Grammophon demeure irremplaçable par sa cohérence scénique et musicale, et surtout parce que c'était la première fois que la musique de Monteverdi sonnait avec cette fraîcheur depuis plus de trois siècles. Tout le monde y croyait, et il n'est que de voir la joie des musiciens de l'orchestre lors de leurs interventions scéniques pour comprendre quel enthousiasme portent ces presque sept heures de spectacle que l'on se surprend à dévorer d'une traite.

     
    Thomas COUBRONNE


     

  • Il Ritorno di Monteverdi
     


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