Giuseppe Verdi (1813-1901)
Aïda, opéra en quatre actes
Nina Stemme (Aida)
Luciana d'Intino (Amneris)
Salvatore Licitra (Radames)
Juan Pons (Amonasro)
Matti Salminen (Ramfis)
Günther Groissböck (Il Re)
Miroslav Christoff (Un messagero)
Christiane Kohl (Una Sacerdossa)
Orchestre de l'Opéra de Zurich
direction : Adam Fischer
mise en scène : Nicolas Joel
décors : Ezio Frigerio
costumes : Franca Squarciapino
éclairages : Hans-Rudolf Kunz
chorégraphie : Stefano Giannetti
2 DVD BelAir BAC 022
Pas facile de représenter Aïda en d'autres temps et d'autres lieux que ceux de la toute puissance des Pharaons ! Et pourtant, Nicolas Joel parvient à nous donner des images complètement nouvelles, sans jouer les iconoclastes ni les provocateurs superficiels comme c'est souvent le cas aujourd'hui avec ce type d'ouvrage.
Estimant assez simplistes les conflits du livret et par trop galvaudées les images d'une Égypte historique, il a choisi de représenter ce qui se cache derrière tout cela, à savoir « le pendant emblématique et le croisement des obsessions d'une époque ». Il a donc replacé l'action dans les décors du temps où l'oeuvre fut créée, autrement dit « au moment où les impérialismes des grandes puissances s'emparaient du Moyen Orient par la diplomatie de la force ».
Cadre colonial fin de siècle donc, avec robes à tournures et palais aux jardins peuplés de palmiers. Cela oblige naturellement à quelques contorsions cérébrales par rapport à la lettre du livret, mais on en a vu tellement d'autres que tout cela paraît plutôt bénin, d'autant que les images sont belles, grâce au talent toujours intact du tandem Squarciapino-Frigerio.
Côté voix, il faut bien reconnaître en revanche qu'on slalome entre les difficultés ou les approximations. Nina Stemme peut sans problème faire toutes les notes de son rôle-titre, même si le contre-ut de l'air du Nil est assez hasardeux, mais avec une voix qui n'a pas la couleur adéquate, qui manque totalement de personnalité et qui a toujours une fâcheuse tendance à trembloter, voir à carrément bouger, ce qui l'empêche de dérouler une ligne de chant crédible. Mais y a-t-il aujourd'hui une véritable Aïda ?
Sans grande inspiration mais avec la voix qui convient, Salvatore Licitra s'en tire mieux en Radamès car les moyens sont solides, tout comme Luciana d'Intino en Amnéris, à condition, bien sûr, d'oublier les Barbieri et autres véritables mezzos Verdi de jadis. Les rôles masculins graves sont tenus par des vétérans aux moyens par trop usés, ce qui étonne de la part d'un théâtre aux distributions généralement beaucoup plus homogènes. La direction d'Adam Fischer, sans grande personnalité elle non plus, ne parvient guère à donner à l'ensemble l'unité musicale qui lui fait défaut.
On rejoint ici encore le problème posé par la gloire naissante de Nina Stemme. La seule présence de cette cantatrice semble justifier brusquement n'importe quelle production, du moment qu'elle y figure. C'est le pire service qu'on puisse lui rendre. Reste que ce DVD vaut le coup d'œil pour cette approche scénique très particulière qui marque peut-être un tournant dans la relecture des grands opéras de Verdi.
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