altamusica
 
       aide















 

 

Pour recevoir notre bulletin régulier,
saisissez votre e-mail :

 
désinscription




SELECTION CD 26 avril 2024

Une Salomé à débat



Après son Elektra expressionniste, Deutsche Grammophon réédite la Salomé péplum de Götz Friedrich, de quelques années antérieures, et présentant la princesse de Judée au milieu d'une cour décadente jusqu'au comique, où le trait est constamment forcé. Impossible toutefois de proposer meilleure équipe musicale. De quoi fournir de l'eau au moulin des débatteurs



Le 20/07/2007
Yannick MILLON
 

  • Une SalomĂ© Ă  dĂ©bat
      [ Toutes les parutions ]


  • Les 3 derniers dossiers
  • Les "indispensables" Bach de nos critiques

  • Telefunken Legacy : le nec plus ultra des collections historiques

  • Les dernières parutions pour l'annĂ©e Bach

    [ Tous les dossiers CD ]


     
      (ex: Harnoncourt, Opéra)


  •  

     Une SalomĂ© Ă  dĂ©bat





    Richard Strauss (1864-1949)
    Salome, drame musical en un acte (1905)
    Livret d'Oscar Wilde, dans la traduction allemande d'Hedwig Lachmann

    Hans Beirer (Herodes)
    Astrid Varnay (Herodias)
    Teresa Stratas (Salome)
    Bernd Weikl (Jochanaan)
    Wieslaw Ochman (Narraboth)
    Hanna Schwarz (Der Page des Herodias)
    Friedrich Lenz (Erster Jude)
    Ewald Aichberger (Zweiter Jude)
    Kurt Equiluz (Dritter Jude)
    Karl Terkal (Vierter Jude)
    Alois Pernerstorfer (FĂĽnfter Jude)
    Heinz Klaus Ecker (Erster Nazarener)
    Norberth Heidgen (Zweiter Nazarener)
    Reinhold Möser (Erster Soldat)
    Wolfgang Probst (Zweiter Soldat)
    Nikolaus Hillebrand (Ein Kappadozier)

    Wiener Philharmoniker
    direction : Karl Böhm
    mise en scène : Götz Friedrich
    décors : Gerd Staub
    costumes : Jan Skalicky
    chorégraphie : Robert Cohan
    Enregistrement : Sofiensaal, Wien, 03/1974 (son) ; Atelier Wien-Film, Wien, 07-08/1974 (image)

    1 DVD Deutsche Grammophon Unitel Classica 00440 073 4339


    On pourra gloser sans fin sur les partis pris de Götz Friedrich, nettement plus contestables que dans son Elektra, sur l'outrance des personnages qu'il présente à l'écran, sur ce Iokanaan à l'air parfois abruti qui semble cousin des Monty Python, sur cette Hérodiade bourrée de tics et tout en œillades crapuleuses, sur cet Hérode aux petites colères, qui glisse très improbablement sur le sang de Narraboth, sur ces Nazaréens en barbe, sur ces musiciens noirs en transe, qui grattant sur une harpe, qui frappant sur un tam-tam pour accompagner la Danse des sept voiles, bref, sur tout l'attirail péplum qui prête largement à sourire dans ce film d'opéra : mais qui a vu et entendu la Salomé de Teresa Stratas n'en guérira point ! Méconnaître cette incarnation rêvée, en un mot idéale, serait pure folie.

    Au milieu du grotesque, on en vient à ne plus remarquer la perversité de la princesse de Judée, à qui on n'aura jamais autant pardonné son caprice, et c'est bien là que Friedrich frappe le plus fort, en faisant oublier l'autour, que seuls les inconditionnels de Fellini, et encore, pourront regarder d'un bout à l'autre sans attraper un fou rire. Pourtant, la photographie, les décors, évoquant eux aussi le cinéma italien, sont de toute beauté – la jaquette du DVD ne le contredira pas.

    Salomé chez les fous

    Le lipsing étant du genre approximatif – sauf pour le rôle-titre –, on aura d'autant plus l'impression que Salomé évolue au milieu des fous, et que la mort est son seul salut pour éviter pareille dégénérescence mentale. Au-delà de ces considérations, qui ne nous gênent pas outre mesure mais qui seront sans doute rédhibitoires à certains, la partie musicale est absolument éblouissante.

    Aussi à l'aise en voix qu'en scène, Teresa Stratas est une Salomé légère mais bien projetée, d'une féminité et d'une sensualité capables de toutes les finesses, de toutes les nuances, et dotée d'un timbre d'une rare splendeur. Tout comme Bernd Aldenhoff, Hans Beirer est un aussi excellent Hérode qu'il était un mauvais Siegfried ou Tannhäuser, prenant la peine de chanter les notes, de faire passer dans la diction les appétits du roi libidineux.

    Astrid Varnay est l'Hérodiade la plus monstrueuse qui se puisse imaginer, une vraie harpie aux moyens hallucinants, avec une égalité dans le timbre – aussi peu séduisant soit-il en 1974 –, un aigu incendiaire et une voix de poitrine à remettre en cause la virilité de l'ensemble des voix masculines du plateau. Wieslaw Ochman demeure le Narraboth absolu, irradiant de lumière et de santé vocale, Bernd Weikl un Iokanaan très solide, sans charme, aura ni magnétisme particuliers, mais il était alors incontournable.

    Une direction aux mille couleurs

    Quant à Karl Böhm, qui avouait préférer Elektra, il impose ici une lecture constamment iridescente, fuyante comme une caresse du voile de Salomé, jamais monumentale, toujours au service du scintillement – la petite percussion –, de l'avancée, de la fluidité, et cette seule version qu'il ait gravée avec le Philharmonique de Vienne brille de mille couleurs et distille des timbres à tomber à la renverse.

    Alors, chers lecteurs, continuez à débattre pour savoir si vous avez affaire à un chef-d'oeuvre du film d'opéra ou à l'un de ses plus mauvais témoins, mais songez aussi qu'il est fort peu probable que vous retrouviez un jour une Salomé, un plateau et une prestation orchestrale de ce niveau. La double notation, rarissime dans ces colonnes, est là pour vous laisser le choix. Le nôtre est malgré tout celui du Coup de coeur.

     
    Yannick MILLON


     

  • Une SalomĂ© Ă  dĂ©bat
     


  •   A la une  |  Nous contacter   |  Haut de page  ]
     
    ©   Altamusica.com