Rencontre avec Mozart

Olivier Bellamy
Entretien avec Wolfgang A. Mozart
Éditions Plon

Courageusement, Olivier Bellamy s’est rendu à Vienne pour y interviewer Mozart. On imagine son trac à la perspective d’affronter le génie des génies dans un tête à tête franc et direct. Mais on est journaliste ou on ne l’est pas. Il a eu raison de ne pas céder à la panique que la plupart d’entre nous aurait eue, car cela a débouché sur un livre tonique, charmant, instructif, inattendu.

Faisant en quelque sorte le travail à l’envers, Bellamy a utilisé la correspondance de Mozart pour y piocher des réponses aux questions qu’il pose. Cela fonctionne très bien, car, dans ses lettres, Mozart fournit un très grand nombre d’informations de toutes sortes, sur lui-même, ses goûts, ses déceptions, son entourage, bref tout ce qu’on a envie de savoir et que l’on n’a pas forcément lu dans les deux volumes de la traduction Curzon de 1928.

Une rencontre pas ordinaire, et une manière à la fois vivante et didactique de mieux connaître cette idole de tous les mélomanes.

Histoires de danse

Mes 15 plus belles histoires de danse
Présentation Agnès Letestu
Éditions Hachette jeunesse

Sous la houlette de la grande ballerine Agnès Letestu, ce livre tout rose rassemble une quinzaine d’histoires illustrant le monde de la danse. Récits de quelques grands ballets, d’expériences diverses de ballerines en herbe ou plus aguerries, on y voit différents aspects de cet art si particulier qui exige autant de force morale que physique. Avec en plus du talent.

Martine Planels, Audrey Alwett, Christine Feret-Fleury, signent ces contes avec autant de respect que d’amour de la danse. Les illustrations très contes de fées d’Alexandra Petracchi, d’Amélie Thiebaud, de Magali Fournier contribuent à créer le climat de rêve qui attire tant de petites filles vers le port du tutu et vers ces mondes magiques dont elles sous-estiment souvent les rudesses.

Joli, peut-être un peu trop sucré d’apparence, mais charmant.

Du grand Luganski

Sergei Rachmaninov (1873-1943)
Sonates pour piano n° 1 et 2
NikolaĂŻ Lugansky, piano
1 CD NaĂŻve Ambroisie AM 208

Il est bien difficile de ne pas reconnaître les multiples affinités naturelles qui relient Nikolaï Luganski à l’œuvre de Rachmaninov. Au concert comme au disque, ses réussites impressionnent. Les deux sonates ne sont pas parmi les œuvres les plus jouées et donc les plus connues de Rachmaninov. On leur préfère souvent les Études-Tableaux ou les Préludes, voire les Concertos.

Assez dissemblables, elles ont pourtant en commun une écriture exigeant le déploiement d’une très brillante technique au service d’un romantisme tantôt proche du rêve schumanien, tantôt bien plus extraverti.

Côté technique, on se doute que Luganski est à la fête et parvient toujours à nous étonner, peut-être encore plus dans la Deuxième Sonate que dans la Première. Côté émotion, il n’a pas ici l’approche un peu distanciée que certains ont pu lui reprocher chez d’autres compositeurs. Il s’exprime sans contrainte, avec une générosité sonore et une capacité au rêve vraiment grisantes.

Du grand Rachmaninov raffiné, subtil, et du grand Luganski.

Le Nouveau Monde de Petibon

Patricia Petibon – Nouveau monde
La Cetra
direction : Andrea Marcon
CD Deutsche Grammophon 479 0079

Quelle est agaçante, Patricia Petibon ! On l’adore et elle énerve. La voix est ravissante quand elle bien employée. Certains de ses disques le prouvent. Certains de ces concerts aussi. D’autres sont ratés. Certains spectacles sont magnifiques, comme sa Lulu de Genève et de Salzbourg, ou même sa Donna Anna de la Bastille. D’autres encore laissent inquiets. Mais elle est rarement ennuyeuse.

Sacrifiant à la mode des disques à thème, elle se lance ici dans un programme Nouveau monde très hétéroclite, dont le fil rouge n’est pas évident, si ce n’est qu’il tourne autour du XVIII^e siècle, avec effectivement un voyage Outre-Atlantique en Amérique latine. Alors on trouve aussi bien de beaux chants traditionnels avec accompagnement de percussion, de guitare que des airs avec théorbe, luth, harpe sud-américaine etc. Du Charpentier et du Rameau aussi, du Purcell et même Greensleeves.

Bref, de quoi faire son marché selon ses goûts. C’est divertissant, inattendu, pas commun du tout, très cross-over quant à l’utilisation de la voix, de quoi faire pleurer les puristes ravir ceux qui de toutes façons, aiment les multiples facettes de l’art de cette personnalité hors normes. À vous de juger !

La Belle de Moscou

The Sleeping Beauty
Musique de TchaĂŻkovski
Chorégraphie de Youri Grigorovitch d’après Petipa
Svetlana Zakharova et David Hallberg
Corps de ballet, Orchestre du BolchoĂŻ de Moscou
DVD BelAir Classiques BAC078

Qui eût cru, il y a une ou deux décennies, que l’on verrait au Bolchoï une Belle au bois dormant décorée par Ezio Frigerio et Franca Squarciapino, comme à Paris ou à la Scala ? Finis donc les décors vieillots et pesants, ringards et poussiéreux qui ont accompagné bien trop longtemps les exploits de l’admirable école russe. Depuis quelques années déjà, Bolchoï comme Mariinski, d’ailleurs, n’ont plus rien à envier à leurs grands collègues européens ou américains. Et danseuses et danseurs non plus, tant pour leur esthétique que pour leur technique.

Cette Belle signée Youri Gigorovitch d’après Petipa, assez différente dans bon nombre de détails de celle que Noureev monta pour le Ballet de l’Opéra de Paris d’après Petipa aussi et qui triomphe toujours, est tonique, jolie à voir, et surtout remarquablement dansée par Svetalna Zakharova et par l’Étoile américaine David Hallberg.

Zakharova est sublime dans le moindre de ses gestes et Hallberg impressionne par la qualité de ses sauts et par sa musicalité. Un bon physique également, poétique et juvénile. Une belle soirée de danse classique à la russe et une épatante leçon de style.