Est-ce la sonorité de la célèbre salle berlinoise de la Philharmonie ? Est-ce l'alliance particulièrement réussie du pianiste et de l'orchestre qui semblent vivre à corps perdu la même aventure romantique avec le même engagement passionnel ? Toujours est-il que le Troisième Concerto pour piano de Rachmaninov bénéficie d'une interprétation à la fois éclatante et profonde, débordante de couleur et de générosité. On sait les critiques souvent adressées à la musique du compositeur à qui l'on reproche ses épanchements trop lyriques et parfois une certaine facilité d'écriture. Sous les doigts d'un pianiste comme Volodos et avec un orchestre pareil, toute restriction disparaît et l'on est emporté par ces flots de musique aux sonorités si riches. Volodos a de la force, mais pas de dureté, de l'élan, mais pas de précipitation. Son rapport à l'instrument est celui d'un échange sans restrictions et ses doigts savent aller chercher au fond du clavier les mille couleurs et les mille nuances nécessaires à l'oeuvre. C'est une grande nature, confirmée dans les pièces pour piano enregistrées en studio et qui complètent le disque. Dans le Concerto, James Levine se prend lui aussi au jeu proposé par le soliste et joue à fond la carte du romantisme déferlant, mais lui non plus sans vulgarité ni sentimentalisme. En effet, l'un et l'autre conservent une grande rigueur qui ajoute à la séduction. Elle constitue un gage de la sincérité indispensable à pareil répertoire.