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SELECTION CD 02 mai 2024

Riche comme Jacobs



À l'écoute de ce Croesus de Reinhard Keiser (1674-1739), arraché à l'oubli par René Jacobs, on peut faire de ce compositeur l'égal d'un Haendel qui fut d'ailleurs son jeune rival à l'Opéra de Hambourg de 1703 à 1707. Ce Croesus constitue un captivant chaînon manquant dans l'histoire de l'opéra.



Le 29/11/2000
Yutha TEP
 

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     Croesus de Reinhard Keiser

    Un opéra inédit de Reinhard Keiser
    Croesus de Reinhard Keiser (1674-1739)
    RIAS-Kammerchor
    Akademie fĂĽr Alte Musik Berlin
    Direction : René Jacobs
    Avec Dorothea Röschmann, Werner Güra, Roman Trekel, Klaus Häger
    Coffret de 3CD HMC 901714.16 DDD


    Loin de la simplification opérée par l'opera seria en vigueur dans une grande partie de l'Europe, Keiser s'accommode d'un foisonnement digne de l'opéra vénitien : pour preuve, le nombre étonnant de personnages (trois barytons dans les premiers rôles !), la complexité des couples amoureux, le mélange de situations sérieuses et de scènes drôles, jusqu'à une quasi-réplique de la confrontation Néron-Sénèque du Couronnement de Poppée dans l'opposition de Crésus au sage Solon, tandis que le rôle bouffe du trivial et goinfre Elcius semble tout droit sorti du Retour d'Ulysse. À signaler aussi le rôle d'Atys, muet pendant une bonne partie de l'opéra. Le livret en allemand, d'une tenue littéraire supérieure à ce qui se pratiquait en Italie, fait la part belle aux sentences morales. Conséquence logique, l'oeuvre n'évite pas certaines longueurs, en particulier dans l'acte I, mais Keiser en profite pour écouler des trésors d'invention musicale.

    L'écriture de Keiser révèle un sens accompli de la ligne mélodique avec des moments d'une intensité et d'une douleur méditative dignes de Bach, en particulier ceux attribués à Elmira. Dès l'éclatante sinfonie d'ouverture, on découvre une science instrumentale qui n'a rien à envier à l'orchestre d'un Giulio Cesare ou d'une Alcina(1), avec des danses que ne renierait pas la tragédie lyrique française, en particulier une grande Chaconne.

    Mais bien évidemment, tant de splendeurs seraient ternes sans d'authentiques orfèvres pour en faire briller les ors. Cordes d'un tranchant rare, cuivres particulièrement brillants, flûtes volubiles, l'Akademie für Alte Musik Berlin s'affirme comme le grand concurrent d'un Concerto Köln avec lequel il partage d'ailleurs plusieurs musiciens. Fervent, d'une homogénéité de timbres et d'une ductibilité admirable, le RIAS Kammerchoor lui donne la réplique à la même altitude. Mais par-dessus tout, il y a René Jacobs, le Midas qui transforme tout ce qu'il touche en or. Sa direction porte un continuo vif-argent, exhorte un orchestre rutilant et galvanise une distribution vocale riche de scintillantes émeraudes et rubis.


     



    Cet enregistrement est la captation d'une série de représentations au Staatsoper de Berlin. René Jacobs emprunte la distribution vocale à l'auguste troupe du théâtre, et si certains seraient manifestement plus à l'aise dans un autre répertoire (beaucoup de mozartiens parmi eux), ils n'en délivrent pas moins des prestations dignes d'éloge. Grâce à sa voix charnue, souple, et à sa ligne de chant immaculée, Dorothea Röschmann est le joyau de cet enregistrement. Baryton de velours, Roman Trekel campe un Crésus d'une noblesse rare. Dans la courte intervention de Solon, Kwangchul Youn montre les qualités qui lui ont permis d'escalader la colline de Bayreuth. Alsacienne perdue dans cette troupe presque entièrement germanophone, la jeune française Salomé Haller saisit parfaitement les occasions de faire valoir la lumière de son timbre.

    Puisse ce Croesus n'être que le prélude d'autres résurrections puisées dans ce répertoire baroque germanique encore largement inexploré. Avec René Jacobs comme joaillier, la fortune des oreilles paraît assurée.

    (1) certains compositeurs contemporains comme Scheibe affirment que Keiser a été une source "d'inspiration" majeure de Hændel.


     

     

  • Croesus de Reinhard Keiser
     


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