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CRITIQUES DE CONCERTS |
04 octobre 2024 |
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Quatrième Symphonie de Bruckner par le Rundfunk Sinfonieorchester Berlin sous la direction de Marek Janowski au festival de Colmar 2015.
Colmar 2015 (2) :
Bruckner dans une fournaise
Au festival de Colmar, Marek Janowski et son orchestre allemand réussissent une superbe interprétation de la Symphonie Romantique de Bruckner, d’une approche rigoureuse et traditionnelle quoique toujours à l’affût du rythme, malgré les trente-huit degrés de l'Église Saint-Matthieu, plus aptes à nous rapprocher de l'Enfer que du Paradis.
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La température n'a pas baissé entre le samedi soir et le dimanche après-midi, où l'Orchestre symphonique de la Radio de Berlin joue sans veste une unique Quatrième Symphonie d'Anton Bruckner. Sans rechercher Dieu ni mystique, Marek Janowski livre une interprétation de grande tradition, dans une formation classique où les violoncelles placés tout à droite du chef devancent les contrebasses juste derrière.
En choisissant la version 1878 avec le Finale de 1880 de la très répandue édition Nowak, Marek Janowski livre un message classique et laisse à d'autres le retour aux versions initiales de plus en plus en vogue chez les spécialistes actuels. L'Allegro molto moderato liminaire donne le ton de l'œuvre et des choix interprétatifs : le rythme allègre ne propose aucun excès de pathos et le chef évite les effets consistant à faire ressortir anormalement tel ou tel instrument, comme on l'entend parfois aujourd'hui par semblant de modernisme ou de nouveauté.
Bien qu'imbibées de sueur, les cordes impressionnent par leur ampleur et par le socle qu'elles parviennent à créer, sans jamais se confondre dans la lourdeur, mais en restant au contraire toujours lyriques. Les violoncelles impressionnent comme la veille par leur chaleur, mais c'est maintenant les contrebasses qui se démarquent, dans les pizzicati surtout.
Plus en difficulté, les cors souffrent beaucoup de la chaleur et n'ont pas toujours la justesse attendue, particulièrement le premier, que la première trompette est même obligée d'aider dans un solo du deuxième mouvement, en intervenant une note plus tôt. Reste alors une petite harmonie impeccable, à commencer par les flûtes et clarinettes, ainsi qu'un timbalier juste et discret, jamais dans l'exubérance.
Pourtant, et comme avec la Première Symphonie de Mahler sous la direction d'Haitink en juin, une rupture se crée au Finale, qui donne à ce concert un nouvel angle et un intérêt supérieur. Car au lieu de chercher à marquer la pulsation pour développer méthodiquement le crescendo initial, à l'instar d’un Thielemann, Marek Janowski intègre à l'arrière-plan la verticalité pour développer une horizontalité inédite, faisant du crescendo une sorte de pierre dévalant la montagne pour se fracasser dans une superbe explosion.
Incapable de proposer un bis dans de telles conditions, les Allemands quittent le festival de Colmar après l'avoir superbement ouvert. Le plaisir d'avoir vu des musiciens souriants et complices, en plus d'être attentifs aux moindres gestes et à la rythmique rigoureuse de Marek Janowski, s'ajoute à celui d'avoir entendu des œuvres germaniques de manières inédites, bien que clairement issue d'une grande tradition. Il faut maintenant attendre l'an prochain, où le chef sera pour la première fois au Festival de Bayreuth !
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Église protestante Saint-Matthieu, Colmar Le 05/07/2015 Vincent GUILLEMIN |
| Quatrième Symphonie de Bruckner par le Rundfunk Sinfonieorchester Berlin sous la direction de Marek Janowski au festival de Colmar 2015. | Anton Bruckner (1824-1896)
Symphonie n° 4 en mib majeur « Romantique »
Version 1878/1880, édition Léopold Nowak (1953)
Rundfunk-Sinfonieorchester Berlin
direction : Marek Janowski | |
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